Dans une usine métallurgique de Rustavi, les ouvriers exécutent des gestes répétitifs et dangereux dans une chaleur infernale et partagent les moments quotidiens de détente dans la convivialité.
- Titre original : Toudji
- Titre parallèle (russe) : Tchougoun
- Titre parallèle : La Fonte
- Titre parallèle : La Fundición
- Genre : Documentaire
- Année de production : 1964
- Année de sortie d'origine : 1964
- Date de sortie en France : 24 février 2004
- Format d'origine : 35
- Métrage d'origine : 480 m
- Visa d'exploitation : 100538
- Réalisateur : Otar Iosseliani
- Scénariste : Otar Iosseliani
- Société de production : Kartuli Pilmi (Tbilissi)
- Directeur de la photographie : Chalva Chiochvili
- (Intérieur) Rustavi, Géorgie
- (Extérieur) Rustavi, Géorgie
Cette copie a été tirée par La Cinémathèque française en 2001 à partir d’un élément de conservation safety provenant de ses collections .
Informations techniques sur les copies
Année du tirage | Procédé image | Version | Métrage | Cadence | Minutage | Format |
---|---|---|---|---|---|---|
2001 | Noir et blanc | Musique | 478 m | 24 i/s | 17 min | 35 |
Projections notables (avec accompagnement musical)
Date de projection | Lieu | Accompagnement musical | Commentaire |
---|---|---|---|
2002-02-14 | Cinémathèque française | Intégrale Otar Iosseliani |
Après l’interdiction de Aprili, Otar Iosseliani s’éloigne pour un temps du monde du cinéma. Accusé de ne «ᅠrien connaître à la vieᅠ», il prend ses détracteurs au pied de la lettre et leur propose d’aller travailler dans une usine. La section idéologique du comité central du Parti Communiste de Géorgie organise son intégration dans l’usine métallurgique de Rustavi. «ᅠJ’ai immédiatement compris le système. C’était un système stakhanovisteᅠ: il y avait un travailleur héros et toute l’équipe travaillait pour lui. Les relations entre les personnes de l’équipe étaient parfaites. Le travailleur héros, de son côté, était l’objet de tous les sarcasmes. Il n’était pas vraiment à l’aise. Mais il disposait d’un bon appartement, de tous les privilèges et était membre du conseil[1]ᅠ». Le travail à la fonte est extrêmement difficile et dangereux, et les horaires sont éreintantsᅠ: Iosseliani tient quatre mois. En 1964, il revient tourner Toudji, film documentaire dans lequel il s’attache à décrire les conditions de travail des ouvriers, plus que le travail de la fonte en lui-même.
Iosseliani photographie avec soin ces ouvriers à peine protégés (chaussures, gants et casques de fortune) opérant des gestes répétitifs, néanmoins contrôlés et soignés, dans la fournaise de la forge. Dans un environnement sonore assourdissant, proche du bombardement, le métal en fusion circule rapidement dans les creusetsᅠ comme le sang dans les artères, les étincelles jaillissent des chaudrons, les flammes et la fumée noires envahissent l’atmosphère et avalent les ouvriers d’apparence si frêle et vulnérable, fragiles ombres chinoises devant l’éblouissante lumière des fours. Mais lorsque la sonnerie de la pause retentit, Iosseliani s’applique à célébrer les gestes quotidiens (la douche, le vestiaire, le repas) qui s’immiscent dans l’univers industriel et l’usage insolite que certains hommes font de leurs outilsᅠ: sécher un vêtement trempé devant un énorme ventilateur, griller les brochettes sur une plaque brûlante… Iosseliani ne valorise pas l’ouvrier pour la qualité de son travail mais pour son génie de l’adaptation, son sens du détournement et son imagination qui font de lui un homme plus qu’une machine. Ces hommes décideront peut être, comme Vincent dans Lundi matin (2002), de quitter un jour cette usine et leur famille pour une excursion italienne…
L’approche documentaire de Toudji est formellement opposée à celle de Sapovnela. L’usage du noir et blanc, que Iosseliani considère comme plus abstrait, plus proche de la photographie, révèle à la fois la dureté de certaines scènes et la beauté des gestes. L’absence totale de voix off et de parole laisse la place à une bande-son minutieusement bruitée et mixée. Toudji est le portrait brut et sans commentaire de ces hommes aux mains croisées, résignées, fatiguées, aux corps rompus et aux visages vides, qui, une fois la journée terminée, enfilent avec une infinie délicatesse leur chemise immaculée pour rejoindre amis et famille. Selon Anthony Fiant «ᅠl’image prime également dans le documentaire et nul doute qu’ainsi [Iosseliani] réussit à percer le secret, à mettre en lumière l’humanité dissimulée de cette usine[2]ᅠ».
Samantha Leroy
[1] Conversa com Otar Iosseliani, entretien avec Luciano Barcaroli, Carlo Hintermann et Daniele Villa, les 21 et 22 février 1998, in Otar Iosselianiᅠ: o mundo visto da Geórgia / A Geórgia vista do mundo, Ed. Cinemateca portuguesa – Museu do cinema, 2006, p.61 (citation traduite du portugais vers le français par l'auteur).
[2] Anthony Fiant, (Et) le cinéma d’Otar Iosseliani (fut), Ed. L’Age d’Homme, Lausanne, 2002, p. 58
Autour du réalisateur
«ᅠConversa com Otar Iosselianiᅠ» in Otar Iosselianiᅠ: o mundo visto da Georgia/ A Georgia vista do mundo, Ed. Cinemateca portuguesa – Museum do Cinema, 2006.
Entretien avec Luciano Barcaroli, Carlo Hintermann et Daniele Villa, les 21 et 22 février 1998.
Raphaël Bassan et Guy Gauthier, «ᅠOtar Iosselianiᅠ», in La revue du cinéma, n°402, février 1985.
Positif n° 206, mai 1978
Entretien réalisé avec Michel Ciment, le 27 juillet 1977.
Positif n°110, novembre 1969
Anthony Fiant, (Et) le cinéma d’Otar Iosseliani (fut), Ed. L’Age d’Homme, Lausanne, 2002.
Autour du film
«ᅠConversa com Otar Iosselianiᅠ» in Otar Iosselianiᅠ: o mundo visto da Georgia/ A Georgia vista do mundo, Ed. Cinemateca portuguesa – Museum do Cinema, 2006.
Entretien avec Luciano Barcaroli, Carlo Hintermann et Daniele Villa, les 21 et 22 février 1998.
Anthony Fiant, (Et) le cinéma d’Otar Iosseliani (fut), Ed. L’Age d’Homme, Lausanne, 2002.
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