Napoléon Méthode

Napoléon est le projet que Stanley Kubrick a préparé avec le plus de soin et de minutie. Ce meuble à tiroirs témoigne de la précision de ses recherches. Il contient des fiches cartonnées relatant non seulement les étapes de la vie de l'Empereur, mais aussi celles de la vie des personnes qu'il a fréquentées, chacune identifiée par une marque de couleur.

Pour parvenir à rassembler autant d'informations, Stanley Kubrick recrute dès juin 1968 une douzaine d'étudiants de Felix Markham, professeur d'histoire à Oxford. Il leur confie la lecture des nombreuses biographies de Napoléon et la rédaction d'une cinquantaine de dossiers biographiques.

Lui-même se plonge dans de nombreux ouvrages : sa collection de livres sur le sujet en compte plus de cinq cents. Il se procure aussi plus de dix-sept mille illustrations représentant Napoléon ou son entourage.

Stanley Kubrick est à l'affût du moindre détail. Il s'intéresse à tous les aspects de la vie du personnage : lectures, relations amoureuses, vie sexuelle, sens de l'humour, préférences culinaires... Il souhaite non seulement donner des repères historiques et géographiques au spectateur, mais aussi lui permettre de découvrir Napoléon au quotidien.

En même temps qu'il perfectionne son scénario, Kubrick prépare le tournage à venir : son assistant Andrew Birkin photographie les monuments français et italiens en lien avec l'histoire napoléonienne. D'autres repérages sont réalisés en Europe de l'Est. Au total, quinze mille photos de repérage sont collectées.

Le réalisateur pense tourner en décors naturels, notamment pour des raisons budgétaires. Il cherche donc les lieux les plus adéquats, mais aussi les pays où la figuration sera la moins coûteuse : il négocie avec le gouvernement roumain afin de s'assurer la présence de cinquante mille figurants issus de l'armée régulière pour des scènes de bataille.

Tous ces documents témoignent de la passion de Stanley Kubrick pour le personnage de Napoléon, mais aussi de l'obstination avec laquelle il a tenté de rendre ce film financièrement possible, sans pour autant renoncer à ses habituelles exigences esthétiques.