Programme de recherche ANR Cinémarchives

La Triangle (1915 - 1919)
Archives, recherche et histoire du cinéma

Les films Triangle à la Cinémathèque française

La restauration de The Desert Man

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Galerie d'extraits de films

Deux extraits de The Desert Man (La Cité du désespoir), William S. Hart, 1916 (restauration Cinémathèque française 2010)

En 1991, la Cinémathèque a acquis une copie nitrate teintée, incomplète, pour la distribution en France. Apparemment unique dans les collections des cinémathèques, cet élément a donc été restauré en 2010. La Cinémathèque a alors procédé à la reconstruction de la trame narrative et au tirage d'un contretype et d'une copie couleurs (procédé Desmetcolor). La restauration de The Desert Man.

Analyse

Heureusement que la cité du désespoir (titre de cette copie française) est une ville fantôme après la ruée vers l'or : cela sert admirablement la pauvreté budgétaire du film, réduit à son squelette en termes d'acteurs et de décor. Nous ne sommes pas dans un film de prestige, mais bien dans la production moyenne de la Kay Bee sous la houlette de Hart, qui en rajoute dans la dureté des temps, puisque son cheval meurt d'épuisement au même endroit où la mère, battue par son irascible mari, vient mourir dudit désespoir, laissant orphelin son unique petit garçon que son mari bat également. Le tyran domestique ne limite pas là son champ de nuisance puisqu'il l'étend à l'ensemble du village en rackettant tout le monde qui doit venir boire et se faire raser dans son minable saloon. Ce manque de respect pour la libre entreprise, les droits de la femme et de l'enfance le feront immédiatement éjecter par Jim Alton qui, ayant perdu son cheval, est bien obligé de prendre ses quartiers quelque part et se retrouve donc au début du film célibataire et père adoptif d'un petit garçon. Heureusement, dans une maison voisine, une jeune fille (interprétée par Margery Wilson qui donne souvent la réplique à Hart) garde son père mourant (le maigrissime Walt Whitman) en jouant de l'orgue. Après quelques péripéties où elle succombera en esprit aux charmes d'un docteur peu scrupuleux venu de la ville, elle finira par revenir à la raison et reconnaîtra les mérites et les sentiments de Jim Alton, ce qui lui permettra de construire une des premières familles recomposées du cinéma américain.

Le film est à la fois sombre (il faut trois orphelins pour faire une famille), squelettique (intrigue, casting et décors), et routinier en ce qui concerne le personnage interprété par Hart, le solitaire au grand cœur qui tombe amoureux d'une citadine beaucoup plus jeune que lui. Ses films en effet répètent ce topos (l'aventurier séduit par une citadine), redoublé par la différence d'âge entre la vedette masculine et la vedette féminine. Mais c'est un film qui mérite considération à plus d'un titre. Tout d'abord sa maigreur lui donne aussi une certaine dignité (c'est un mélodrame sans fioritures), mais surtout traduit bien l'état de la production, au moment où l'on étend à des longs métrages de petites histoires conçues pour des courts métrages, avec peut-être d'ailleurs un budget approchant. Enfin, la présence de Joseph August, fidèle de Ince et de Hart, à la direction de la photographie, assure souvent des effets lumineux de grande qualité, notamment dans le clair-obscur.

crédits

Le programme de recherche ANR Cinémarchives regroupe la Cinémathèque française, l'université Sorbonne Nouvelle - Paris 3, l'université Paris Diderot - Paris 7, le Centre national de la Recherche scientifique et l'université Paul Valéry - Montpellier 3, avec le co-financement de l'Agence nationale de Recherche.

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