Projets de costumes par Erich von Stroheim pour « La Symphonie nuptiale » (Erich von Stroheim, 1926)

26 février 2019

Dans les collections de la Cinémathèque française, deux dessins de la main d’Erich von Stroheim qui attestent du sens du détail de ce génie perfectionniste et contribuent à nourrir son légendaire personnage. Deux projets de costumes pour La Symphonie nuptiale, son septième film en tant que réalisateur mais également scénariste, producteur et acteur principal. Sa collaboration aux costumes signés Max Rée est notoire, même s’il n’est pas crédité au générique – Stroheim s’y est déjà essayé pour Chevaux de bois (1922) et La Veuve joyeuse (1924).

Derrière le trait amateur, la rapide mise en couleurs aux crayons et les proportions maladroites de ces militaires dignes d’une toile de George Grosz, la silhouette de Stroheim, affublé de son fameux monocle. Il porte lui-même ces uniformes de parade aux multiples accessoires pour le rôle du Prince Nikki dans La Symphonie nuptiale. Et il arbore une tenue similaire à celle du « Safe Guard mounted » sur un cliché personnel – un fake qui circule dans la presse de l’époque. Inventeur de sa propre biographie, relayée par Hollywood, l’homme se confond avec son personnage.

Évocation de son passé européen, symbole pittoresque du vieux continent, l’uniforme de Stroheim est un élément essentiel à la fabrique du mythe. Il cristallise le prototype parfait du militaire germanique incarné par Stroheim. Né à Vienne sans particule, il reste, pour la postérité, l’officier allemand (même s’il le parlait à peine) d’ascendance aristocratique. Réformé deux fois de l’Armée Royale et Impériale, Erich von Stroheim n’est pas plus noble que haut gradé – malgré un faible pour la cavalerie et une rigueur prussienne. Créateur de sa propre légende, l’autrichien qui rêvait d’une grande carrière dans l’armée perfectionne son rôle de films en films, depuis ses premiers pas devant la caméra comme figurant. Durant la Grande Guerre, Stroheim joue le méchant teuton dans sept films de propagande américains avant d’incarner, dans ses propres réalisations, officiers et nobles libertins plus ou moins respectables qu’il se targue d’avoir été – de Maris aveugles (1919) à La Symphonie nuptiale (1926) en passant par Folies de femmes (1921) et Chevaux de bois (1922). La carrière d’acteur qui suit son interdiction de mise en scène est jalonnée de figures militaires et achève d’offrir à Stroheim ses galons.

À noter parmi les documents de travail déposés par Erich von Stroheim et son épouse Denise Vernac à la Cinémathèque, une imposante série de 41 planches de costumes dessinés par le cinéaste pour Maris aveugles. Henri Langlois, fondateur de l’institution, avait aidé Stroheim à reconstituer La Symphonie nuptiale dans les années 50 et collectionnait ses portraits, jusqu’à en passer commande à Magritte pour illustrer un dépliant de son Musée du cinéma. L’authentique costume du Prince Nikki, ses casques et nombreux accessoires, sont également conservés à la Cinémathèque.


  • Type d'objet : Maquettes de costumes
  • Support : Crayons de couleur et mine de graphite sur papier
  • Auteur : Erich von Stroheim
  • Pays : États-unis
  • Format : 26,5 x 20 cm
  • Crédits : © Erich von Stroheim