William Wellman, né en même temps que le cinéma en 1896, est de cette trempe de cinéastes qui ont commencé pendant le muet et traversé ensuite toute l'ère des studios. Géant du système au même titre qu'un John Ford ou un Raoul Walsh, son style reste rétif à l'unité comme à la transparence classique. Du classicisme, Wellman représente avant tout l'énergie, ce dès son premier succès à grande échelle, Les Ailes (1927) – mais aussi la faille. Peintre bouleversant de la Grande Dépression avec L'Ennemi public (1931)ou Wild Boys of the Road (1933), il en conservera toute sa carrière un profond scepticisme sur la nature humaine. En témoignent ses splendides westerns d'outre-tombe comme L'Étrange Incident (1943) ou Track of the Cat (1954), hantés par l'injustice et la malédiction historique. Un embryon de conscience critique au cœur du système, qui préfigure déjà le Nouvel Hollywood. — Mathieu Macheret