Le Chant du Missouri

jeudi 6 juillet 2023, 19h00

Salle Henri Langlois

19h00 21h55 (173 min)

Le Chant du Missouri Meet Me in St. Louis
Vincente Minnelli
États-Unis / 1944 / 113 min / DCP / VOSTF
D'après le roman Meet Me in St. Louis de Sally Benson.

Avec Judy Garland, Margaret O'Brien, Mary Astor.

Les Smith vivent paisiblement à Saint-Louis, Missouri. Lorsque le père accepte un emploi à New York, les enfants ne peuvent se résoudre à quitter leurs amis, d'autant plus que les aînées vivent leurs premières amours.

Splendeur visuelle, la première réalisation majeure de Vincente Minnelli est l'adaptation de courtes histoires autobiographiques de Sally Benson, scénariste de L'Ombre d'un doute d'Alfred Hitchcock, parues dans le New Yorker. Chronique familiale qui s'étend sur quatre saisons, Le Chant du Missouri restitue le regard idéalisé d'une petite fille sur le monde de son enfance. Celui d'une Amérique d'avant la Grande Dépression, d'avant les guerres, d'avant l'entrée violente dans le XXe siècle. La chatoyance des couleurs, le soin maniaque apporté aux décors et aux costumes, et le parti pris, pour une des premières fois au cinéma, d'inclure totalement les moments chantés au récit, confèrent au film l'essence d'un rêve. « There's no place like home », disait Judy Garland dans Le Magicien d'Oz en 1939. Répétée comme un mantra, cette phrase permettait dans le film de Victor Fleming de rentrer au pays natal. Cinq ans plus tard, alors que la guerre fait toujours rage au moment de la sortie du Chant du Missouri, l'heure n'est plus au voyage initiatique. On ne rentre plus, changé, au pays natal, c'est le monde qui change, et vient jusqu'au pays natal : « C'est ici, à l'endroit même où nous vivons, juste ici à Saint-Louis », dit Esther (Judy Garland) en découvrant l'exposition universelle. Comme la jeune Tootie obsédée par la mort, le film regarde avec fascination brûler les derniers feux d'un monde rattrapé par la modernité. Le Chant du Missouri, c'est celui, funèbre, d'une Amérique de Cocagne perdue, au sein de laquelle le public, qui fit un triomphe au film, avait, en 1944, besoin de se blottir à nouveau. There's no place like home was.

Olivier Gonord

À partir de 9 ans

60 min

À la suite de la projection du film Le Chant du Missouri de Vincente Minnelli.

« Judy [Garland] avait un caractère changeant, passant sans transition de l'exubérance à la mélancolie, mais elle était fondamentalement pleine de charme et de séduction. Il ne faut pas oublier que Judy était à la fois la star et la grande chanteuse du film [Le Chant du Missouri], si bien qu'elle en constituait en quelque sorte le pivot pour réussir l'intégration des chansons à l'intrigue. Si Judy n'avait pas finalement cru à l'entreprise, le film aurait été un échec complet. Aussi, lorsque je la vis s'y engager à fond, je compris que nous allions au contraire vers un grand succès ! (...) Le Chant du Missouri fut mon examen de passage définitif. Louis B. Mayer [patron de Metro-Goldwyn-Mayer] se montra très enthousiaste, et tous les autres grands pontes de la direction, qui avaient été contre le projet à l'origine, reconnurent leur erreur. Quant aux critiques, elles furent dithyrambiques. »
(Vincente Minnelli, Tous en scène : Autobiographie, 1981)


Murielle Joudet est critique de cinéma au Monde, elle anime une émission d'entretiens sur le site Hors-série. Elle a publié Isabelle Huppert : vivre ne nous regarde pas (Capricci, 2018) et Gena Rowlands : on aurait dû dormir (Capricci, 2021). Elle a aussi écrit La Seconde Femme, un essai sous-titré : Ce que les actrices font à la vieillesse (Premier parallèle, 2022) ainsi qu'un livre d'entretien avec Catherine Breillat, Je ne crois qu'en moi (Capricci, 2023).

Bernard Benoliel est directeur de l'action culturelle et éducative à la Cinémathèque française.