Allez coucher ailleurs

jeudi 16 décembre 2021, 19h30

Salle Georges Franju

19h30 22h00 (150 min)

45 min

Pour clore avec son cent-vingtième numéro l'aventure de Trafic, revue trimestrielle de cinéma, nous avons choisi d'honorer les premiers mots des vers d'Ezra Pound mis en exergue de notre premier numéro, « Ce que tu aimes bien demeure ». La Cinémathèque française, Musée du cinéma, qui nous a souvent accueillis par le passé, nous a paru plus que jamais le lieu élu pour faire résonner cette mémoire.
Parmi tant de films possibles choisis par les auteurs de ce numéro, il a semblé que le film de Howard Hawks, I Was a Male War Bride (1949, devenu en français Allez coucher ailleurs), alliait de façon particulièrement juste, et joyeuse, classicisme et modernité.

« Avec le même effarement que Monsieur Jourdain se découvrant prosateur chez Molière, j'ai appris dans la lettre d'une ancienne étudiante américaine, fervente lectrice de la reine des études de genre Judith Butler, (...) que je n'étais pas, comme je le croyais depuis longtemps, un homme mais un cisgenre. (…) La présence constante dans la lettre (...) d'un ou deux modestes points dits médians, loin d'en alléger la lecture, la rendait rebutante, plutôt excluante et difficilement prononçable. Passé un moment de désarroi et pris d'un fou rire intérieur, je me suis demandé si un film parviendrait un jour à rendre compte, avec drôlerie, de ces déconcertants bouleversements dans la langue. Il m'est alors apparu comme dans un éclair que ce film n'était pas à venir : il existait, et c'était un film de Howard Hawks intitulé I Was a Male War Bride, sorti en 1949. »
Jean Narboni (Trafic, n° 120, Hiver 2021)


Allez coucher ailleurs I Was a Male War Bride
Howard Hawks
États-Unis / 1948 / 105 min

Avec Cary Grant, Ann Sheridan, Marion Marshall.

Les tribulations amoureuses d'un couple de militaires en 1945. Cary Grant se débat avec sa virilité, qu'il cache sous une jupe. Travestissement et personnage féminin déterminé, les thèmes fétiches de Hawks dans une comédie qui raille l'armée américaine et envoie valser tous les stéréotypes.

Dans l'esprit de Hawks, le scénario se résume à une blague : « Cary Grant et Ann Sheridan se marent et, durant six bobines, ils ne parviennent pas à se mettre au lit, jusqu'à ce qu'ils dépassent la statue de la Liberté, en rentrant à New York... » Personnage féminin déterminé, travestissement, le cinéaste joue avec ses thèmes fétiches. Cary Grant se débat avec sa virilité en la cachant sous une jupe, et Hawks déboulonne et malmène le mâle avec délectation. Même si ça et là brillent quelques éclats de gravité – le film, tourné en Allemagne, traîne dans son sillage des scories de la guerre – Hawks raille l'armée américaine et envoie valser tous les stéréotypes. Une belle manière de conclure, après La Dame du vendredi et L'Impossible monsieur Bébé, son triptyque de comédies sexuelles et sexuées.

À partir de 10 ans