Après la surprise P'tit Quinquin, le cinéma de Bruno Dumont poursuit sa profonde mutation vers un registre burlesque, faisant la part belle à la fantaisie. Avec Ma Loute, il explore sur grand écran l'atmosphère absurde imaginée dans sa mini-série, en mettant en scène une improbable lutte des classes. Désireux de creuser une autre forme de radicalité entre ambition folle et liberté de ton, le réalisateur veut retravailler son style pour susciter la curiosité et l'étonnement. Dans un singulier mélange des genres, il rassemble la comédie, le polar et la satire sociale au cœur d'un film à la fois inspiré par le cinéma muet et Affreux, sales et méchants d'Ettore Scola. En étudiant le langage, sa distorsion et sa transformation, Bruno Dumont permet à son trio d'acteurs de surjouer l'extravagance avec joie en étreignant les moindres clichés. Sans établir de distinction entre ses protagonistes, il réprouve la prétention et l'incompétence de chacun à une époque où la société se doit d'évoluer – comme le montre le beau personnage de Billie/Raph.