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Un film restauré et numérisé par Les Films du Panthéon, en collaboration avec Les Films du Jeudi, avec le soutien du CNC et de la Cinémathèque française.
Remerciements Martin Kœrber, Murnau Stiftung. Moyens techniques Hiventy, d'après les négatifs originaux nitrates.
Ressortie en salles Tamasa.
C’est Fédor Chaliapine, qui avait triomphé dans l’opéra de Massenet, qui souhaitait être enregistré dans un film de Don Quichotte. Pabst était le dernier d’une série de réalisateurs envisagés ; le chanteur avait même fait approcher Eisenstein. La production en deux versions, française et anglaise, fut hasardeuse. Contrairement à sa réputation, Don Quichotte – presque toujours vu dans des versions réduites – ne marque pas le début du déclin de Pabst. C’est plutôt son dernier film ambitieux, et le dernier où domine sa conception plastique héritée du Muet, où une caméra sans cesse en mouvement raconte l’histoire dans des décors imposants. Avec une séquence générique d’animation due à Lotte Reiniger, des airs qui ressemblent à des songs, des acteurs ambulants faisant écho à l’action, un peuple opprimé et inconscient à l’arrière-plan, ce film musical (où Jacques Ibert remplaça Maurice Ravel, d’abord sollicité) pourrait prendre la relève de L’Opéra de quat’ sous. « Mirage de la perspective historique ? » écrit Edgardo Cozarinsky : « Don Quichotte apparaît aujourd’hui comme imprégné de l’expérience Weill-Brecht : interruption du flot narratif, perspective sur l’action et les enjeux, l’adaptation de Cervantès en blocs presque indépendants. » Barthélémy Amengual croyait y voir désengagement, refuge dans le mythe et l’art ; à l’inverse, Quichotte devient un champion de la justice humaine contre la providence divine. Le pouvoir envoie la bibliothèque au bûcher à défaut de l’homme ; mais le livre de Cervantès renaît des cendres. L’autodafé des livres de Quichotte, « qui brûlent et ne veulent pas brûler » (Henri Langlois), précède de quelques mois la Bücherverbrennung de Berlin en mai 1933.
Bernard Eisenschitz