Fat City

mercredi 13 mars 2019, 14h00

Salle Georges Franju

14h00 15h40 (100 min)

John Huston
États-Unis / 1971 / 100 min / 35mm / VOSTF
D'après le roman Fat City de Leonard Gardner.

Avec Stacy Keach, Jeff Bridges, Susan Tyrrell.

Deux boxeurs, l'un novice et l'autre plus tout jeune, rêvent de victoires ou de remonter sur le ring. Mais il y a loin du rêve à la réalité, une réalité qui cogne dur dans les maisons, les bars et les rues de cette ville américaine à l'abandon.

« À l'âge de six ans, ma mère m'a emmené voir Fat City dans un cinéma de Stockholm. Je vois l'influence incontestable de ce film dans tout ce que j'ai pu faire depuis. » (Nicolas Winding Refn)

Dix ans après le tournage dans le Nevada de The Misfits, suivi de quelques bourlingues cinématographiques en Europe, John Huston rentre au pays. Mais si c'est la Californie, ce n'est pas non plus Hollywood, plutôt une sorte de terminus : Stockton, tout le monde descend. Une ville pouilleuse, un monde écroulé, où tout est en cours de démolition, les maisons, les hommes et les espoirs qui vont avec. À vingt-quatre images/seconde mais comme au ralenti, Huston filme principalement deux histoires qui se croisent, dissemblent et se ressemblent pour finir toutes deux, face caméra, accoudées au même comptoir. Comme à la boxe, à ma gauche, Tully (Stacy Keach), un tocard alcoolique qui rêve d'une seconde chance. À ma droite, Ernie (Jeff Bridges), un fougueux poulain mais trop tendre. L'un dégringole, l'autre ne décolle pas, ils suivent différemment une même pente et chaque jour qui passe les envoie au tapis. Peut-être le cinéaste regarde-t-il le raté qu'il aurait pu être, qu'il a peut-être été, d'où son regard amoureux. Avec Conrad Hall, son chef opérateur, il nimbe d'une lumière protectrice des figures déjà dans l'ombre. De fait, il émane une réelle beauté des couleurs sales et, discrète victoire, une sorte de classe de ces corps désœuvrés toujours désireux de reconquérir leur dignité évanouie. Une dignité qui mord la poussière à chaque fois, mais une poussière qui leur fait à l'écran une aura de clochards célestes.

Bernard Benoliel