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Tourné et monté en seulement cinq semaines, en plein mouvement Provo de 1966.
Ou « Le retour pas très heureux de Josef Katus dans la ville de Rembrandt ». Josef Katus revient à Amsterdam pour y mourir. Il a beaucoup bourlingué et vendu à Paris ses vêtements d'hiver pour revenir chez lui en train. À Amsterdam, il renoue avec quelques-uns, se sent traqué par la police et est rongé par un mal mystérieux. Il en mourra d'ailleurs. En attendant, tout n'est que sursis, existence provisoire, au jour le jour, rencontres, errances dans la ville. (Il n'est pas fréquent qu'Amsterdam et son ennuyeuse beauté passent ainsi l'écran.) Il rencontre une jeune juive et lui parle de ses voyages, il rencontre des Provos et manifeste avec eux (mais il ne croit pas en leur philosophie et s'il marche avec eux c'est au sens littéral), fait un peu le trafic du LSD, route les uns et les autres et meurt sans savoir pourquoi on le suivait. Le grand mérite de Verstappen est d'avoir joué – avec brio – deux cartes différentes. D'une part, il ne se refuse rien de ce qui peut rendre dramatique, voire pathétique, le sort de Katus. Les ficelles ne sont pas cachées : retour au pays natal, homme traqué et solitaire, celui qui doit mourir, etc. Autant de situations fortes qui sont toujours présentes. Il suffit d'une musique sourde et menaçante, très semblable à celle utilisée par Goldman dans Echoes of Silence, que ce film évoque souvent. D'autre part, il ne se refuse ni le plaisir ni même l'abus d'une caméra maniable et d'un cinéma direct. C'est-à-dire qu'il ne perd jamais son héros de vue, le suit partout et toujours, épousant du parcours les rencontres et les obstacles. Si bien que le film est simultanément (un peu comme chez Rouch) inéluctable et ouvert à tous les hasards, joué d'avance et s'improvisant à chaque instant. C'est le mouvement même de la vie, de la dernière semaine de Josef Katus qu'un rien distrait de son sort et qu'un rien y replonge. Dès lors, rien de ce qui se trouve sur son chemin ne saurait être indifférent.
Serge Daney