Le Diable probablement

dimanche 29 juillet 2018, 19h30

Salle Georges Franju

19h30 21h05 (95 min)

Robert Bresson
France / 1977 / 95 min / 35mm

Avec Antoine Monnier, Tina Irissari, Henri de Maublanc.

Robert Bresson est le cinéaste dont l'œuvre m'a le plus marqué. C'est sans doute parce que ses films transcendent le cinéma. Parce qu'il est l'un des plus grands artistes du XXe siècle. Et dans ses derniers films, que j'ai découverts lors de leur sortie en salle, moi-même porté par une vocation dont j'étais encore incertain d'où elle me mènerait, il m'est apparu comme le nord magnétique sur lequel régler ma boussole, le témoin, visionnaire, d'un monde ayant perdu ses valeurs et ses repères, abandonné à un matérialisme sans issue. L'œuvre de Robert Bresson ne fera que grandir parce que c'est chez lui que les jeunes cinéastes présents et à venir viendront chercher, comme je l'ai fait, le cinéma dans toute sa clarté, miroir non pas du monde mais de l'âme. — Olivier Assayas

« Le gâchis qu'on a fait de tout », répondait Robert Bresson questionné sur l'origine de ce qui allait devenir son avant-dernier film, primé au festival de Berlin. Dès la fin des années 1970, le cinéaste engage, chose extrêmement rare à l'époque, une réflexion sur l'écologie et l'avenir du vivant. Les images documentaires que les jeunes visionnent sont insoutenables : déforestation, pollution des cours de rivières, massacres de bébés phoques. Aucun didactisme, pourtant : si la révolte d'une génération contre la société de consommation semble fasciner le réalisateur, il sait gré aux jeunes de leur organisation précaire et des difficultés existentielles propres à leur âge, mêlées à leurs problèmes sentimentaux. C'est ainsi que le récit de leur prise de conscience devient poignant et plus que jamais actuel. Car à travers les figures de Michel et de Charles, au-delà de leur amitié et leur rivalité en amour, ce sont deux conceptions de la lucidité qui s'opposent dans le film : l'engagement contre le nihilisme ; la militance, même désespérée, contre la mort hautaine. Mais n'est-ce pas la tendresse seule, celle des filles, qui demeure dans ce chaos moderne ? Bresson nous laisse l'infinie et troublante liberté d'y croire.

Gabriela Trujillo