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Restauré en 4K par Paramount.
Jamais peut-être le star system ne fut aussi flamboyant qu'au temps du muet. Les premières stars du cinéma, leur train de vie, leurs frasques, et leur dépravation supposée entretiennent tous les fantasmes et font rêver les foules. Le cinéma crée des idoles décadentes vénérées et haïes, des demi-dieux vivant dans une tour d'ivoire qu'on appelle Hollywood. En 1950, quand Boulevard du crépuscule se retourne sur cette époque, ce n'est pas pour en chanter le souvenir glorieux. La splendeur est passée, fanée, et la gloire s'est muée en malédiction. Le parlant a depuis longtemps balayé le souvenir des icônes d'hier et le palais que découvre par hasard Joe Gillis (William Holden) tient davantage de la maison hantée que du château de conte de fées. Dans cet îlot protégé et ignoré du monde vit une reine sans royaume, une étoile oubliée qui,en tentant un impossible come-back, se heurtera à la réalité de sa déchéance. Pour l'interpréter, Wilder fait sortir de sa retraite Gloria Swanson et nourrit le film d'éléments biographiques, entretenant une confusion troublante entre les personnages et leurs interprètes. Swanson, von Stroheim, mais aussi Cecil B. DeMille dans son propre rôle ou les apparitions de Buster Keaton, H. B. Warner ou Anna Nilsson : Boulevard du crépuscule convoque pour un ultime tour de piste les fantômes d'un temps perdu. Boulevard du crépuscule ressuscite et achève les morts-vivants et, en évoquant la fin du muet, prophétise également celle à venir du système des grands studios. Ivres de leur grandeur passée, coupés d'un monde qui change et sourds à ses rumeurs, ils devront quinze ans plus tard, comme lors du passage au parlant, à nouveau mourir pour renaître.
Olivier Gonord