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Chaque génération, semble-t-il, possède son propre remake de cette adaptation du roman-feuilleton de Jack Finney, dont les thèmes ont suffisamment fait écho pour supporter une reconstitution en 1978, 1993 et en 2007 (sans compter les diverses imitations au fil des années). Exceptionnellement pour un film de science-fiction, il dérive sur le terrain du film noir dans le traitement et dans l'approche. Lorsque les habitants d'une petite ville de Californie commencent à s'inquiéter que leurs proches aient subtilement « changé », ils doivent faire face à l'inconcevable... Ils n'ont pas simplement changé, ils ont été remplacés par des clones extraterrestres qui ont poussé dans des cosses. Ce thème de la perte d'identité apparaît fréquemment dans les années 1950 et il n'est pas limité à la science-fiction, mais s'aligne sur une dépendance grandissante typique de la guerre froide vis-à-vis de la psychiatrie et de la peur de l'apocalypse. L'approche pragmatique de Don Siegel intensifie le suspense. Kevin McCarthy, un ami cher qui a travaillé avec moi sur plusieurs projets, a toujours été perplexe à l'idée qu'il était destiné, malgré une extraordinaire carrière d'acteur allant de Tchekhov à Vonnegut, à ce que le meilleur souvenir que l'on garde de lui soit celui des dix-neuf jours qu'il a passés en 1955 à courir dans tous les sens au studio d'Allied Artists pour combattre les extraterrestres.
Joe Dante
Quand il entame le tournage de L'Invasion des profanateurs de sépultures, première adaptation du roman de Jack Finney, Don Siegel hérite de conditions de tournage et d'un budget parfaitement ridicules : 400 000 dollars, qui ne lui permettent pas d'espérer jouer des coudes avec les superproductions SF contemporaines (Planète interdite, tourné lui aussi en 1955, bénéficie d'un budget dix fois supérieur). Cette économie de moyens, à laquelle le cinéaste est rôdé depuis déjà dix ans, fait aujourd'hui la force du film, modèle de série B à l'efficacité sèche. Loin des ovnis qui ont envahi les films de Robert Wise, William Cameron Menzies ou Jack Arnold à la même époque, Siegel joue de la paranoïa du quotidien, faisant des gros plans sur les visages impassibles de ses acteurs le principal effet spécial du film. Jetée aux orties par ses producteurs, la fin, d'un pessimisme noir, initialement montée par le cinéaste (le célèbre « You're next », crié par Kevin McCarthy, dans le rôle de sa vie) fut remplacée par un happy end qui ne dupe personne. Car s'il fut un temps envisagé, un peu facilement, comme métaphore du communisme, le film est autrement plus subversif, qui dénonce l'uniformisation morne de la société américaine mais aussi, de manière plus grinçante et cryptée, la lâcheté des producteurs d'Allied Artists : « Ce qu'ils n'ont pas compris, c'est que le film parlait d'eux : ils n'étaient rien d'autre que des légumes vivants ! », raillera Siegel.
Xavier Jamet