Six femmes pour l'assassin

vendredi 8 juillet 2016, 20h00

Salle Henri Langlois

20h00 21h30 (86 min)

Six femmes pour l'assassin Sei donne per l'assassino
Mario Bava
Italie-France-RFA / 1964 / 86 min / 35mm / VF

Avec Eva Bartok, Cameron Mitchell.

Une série de meurtres est perpétrée sur les mannequins d'une maison de haute couture réputée.

Avec l'histoire d'un tueur en série évoluant dans le milieu de la mode, Bava peaufine les mécanismes du thriller italien moderne et invente un univers mental baigné de couleurs irréalistes. Sensuel et sanglant, l'acte fondateur du giallo.


Beaucoup de choses ont été écrites sur la révolution qu'a représenté Six femmes pour l'assassin. Le film, on le sait désormais, inventa un nouveau genre cinématographique, se nourrissant d'influences diverses (Hitchcock, les Krimi ouest-allemands) se singularisant moins par ses thèmes que par la manière dont il inventait un nouveau rapport à la violence, en mêlant culture haute et basse, opéra et roman photo, dans la fureur d'une volonté syncrétique totale. Réalisé en 1964 par Mario Bava, le film confirmera le génie d'un artiste qui avait tourné le dos à l'irrésistible élan réaliste du cinéma italien depuis l'après-guerre pour décrire un monde ne renvoyant qu'à un univers mental, abstrait. Construit sur une sédimentation de scènes de meurtres d'une cruauté rare pour son temps, Six femmes pour l'assassin, avec sa figure inoubliable d'assassin sans visage, se déconnecte radicalement de toute analogie avec le monde réel par un emploi démentiel des couleurs et une vision rejetant le naturalisme obligatoirement rattaché à tout récit policier qui se respecte. La mise en scène, à la fois raffinée et barbare, de divers assassinats effleure une forme subtile d'étrangeté tout en maltraitant les nerfs du spectateur. Si le récit se situe dans l'atmosphère vénéneuse d'un atelier de couture c'est que s'y rend possible la confusion entre la figure humaine et son simulacre. Mannequins en osier ou en plastique et modèles en chair et en os voués à être renvoyés au néant se confondent dans le devenir-objet que représente la mort. Ce motif du vivant et de la poupée renvoyant à une des figures les plus anciennes du cinéma expressionniste et de la littérature fantastique. La maison de couture devient le théâtre d'un carnaval morbide et fascinant. Et le cinéma italien n'allait plus jamais être le même.

Jean-François Rauger