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Tandis qu'il peine à réunir les fonds nécessaires pour terminer le dernier long métrage de Jean-Luc Godard, Je vous salue, Marie, le producteur Alain Sarde propose au cinéaste un film de commande dont il a coécrit le scénario avec Philippe Setbon. Triangle amoureux imaginé comme une valse des corps dans les couloirs labyrinthiques d'un hôtel, Détective porte – malgré son absence à l'écriture – toutes les obsessions esthétiques et les thématiques essentielles du réalisateur. Dans un exercice de style aux ellipses incessantes, Godard transforme son intrigue policière en film noir, faisant du cinéma un produit de consommation. Fidèle à sa radicalité et à ses expérimentations fétiches, il s'amuse du script de départ pour mieux réinventer un puzzle d'hommes et de femmes liés par le désir et l'argent. Parmi eux, il filme notamment Johnny Hallyday – pour une collaboration inattendue – avec une bienveillance suffisamment étonnante pour dévoiler une part de mélancolie insoupçonnée dans son jeu. Si l'enquête passe vite au second plan, Détective gagne tout son intérêt dans sa tenace ambiguïté entre légèreté et nostalgie. En le dédiant à Clint Eastwood, John Cassavetes et Edgar G. Ulmer, Godard proclame son affection pour le cinéma de genre américain, qu'il revisite avec son propre sens de l'absurdité.