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Quand Paul Verhoeven accepte de réaliser Rocobop en 1986, le scénario du film a été refusé par à peu près tous les réalisateurs de Hollywood. Lui aussi rebuté après une première lecture rapide, il se laisse finalement convaincre par sa femme qu'il y a peut-être bien là, potentiellement, quelque chose à tirer de ce concept a priori idiot. Après l'échec de son dernier film européen, La Chair et le sang, Verhoeven traverse l'Atlantique et se confronte à l'Amérique reaganienne dont le Detroit moribond du film devient le parfait symbole. La charge est violente et sans nuance : les États-Unis sont aux mains de complexes militaro-industriels dont le cynisme régit une société rongée par le consumérisme. Au sein de ce cloaque, la figure christique du Robocop agit en rédemptrice d'une nation à la recherche de sa dernière part d'humanité. Souvent drôle, tant il pousse loin la satire politique, d'une violence grand-guignolesque assumée comme telle, le film est un succès commercial et lance véritablement la carrière américaine de Verhoeven en faisant de Robocop l'un des personnages les plus emblématiques du cinéma américain des années 1980. La critique, elle, se déchire sur le contenu idéologique du film, tantôt vu comme l'apologie d'une justice expéditive déshumanisée, tantôt comme un pamphlet gauchiste. Verhoeven continuera, lui, à cultiver à l'écran une ambiguïté morale apparente qu'il poussera à son comble dans Starship Troopers, dix ans plus tard.
Olivier Gonord