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Par quel étrange coup du sort les débuts de Leos Carax ont-ils pu être assimilés au cinéma pubard dit « du look » des années 1980 (Beineix, Chatiliez, Besson) ? De ses films, Mauvais Sang est sans doute celui qui a le plus prêté à confusion, à cause du tournage en studio, de sa rue reconstituée comme dans un film des années 1930, de son jeu de couleurs très « Art déco » sur les supports/surfaces. Mais son rythme tout en temps morts, ses silences appuyés, ses rapports diffractés entre l'image et le son, son formalisme entièrement dévolu à l'aventure du plan, font clairement la différence. Sous les oripeaux d'un polar en bout de course, le film est un poème d'amour fou au temps du sida, postulant un retour du romantisme sous sa forme hagarde. Alex (Denis Lavant), jeune voyou aux mains agiles, ventriloque à ses heures, croise la route de vieux gangsters en bout de course (Michel Piccoli, Hans Meyer, Serge Reggiani) qui l'embarquent dans un coup qui pourrait tous les mettre à l'abri : voler, dans les hauteurs d'une tour de la Défense, la souche d'un virus (le STBO) qui infecte « par milliers les amants qui font l'amour sans aucun sentiment ». Le casse importe moins que la nuit le précédant, chauffée à blanc par le passage de la comète de Halley. Nuit qu'Alex passe aux côtés d'Anna (Juliette Binoche), la maîtresse de son recruteur, et que Carax étire au maximum, la creusant par les tours et détours de sa mise en scène – dont un travelling épique au son du Modern Love de David Bowie. Le spectre de la maladie et de l'empêchement relance ici l'absolu de l'amour : s'aimer par-delà les corps, par-dessus tout.
Mathieu Macheret