Among the Living

vendredi 22 juillet 2011, 19h00

Salle Henri Langlois

19h00 20h10 (67 min)

Stuart Heisler
États-Unis / 1941 / 67 min

Avec Albert Dekker, Susan Hayward, Harry Carey, Frances Farmer.

Un homme instable s'échappe de prison et bouleverse la vie de son frère jumeau.

On commence à mieux cerner l'énigmatique Stuart Heisler à travers plusieurs de ses réussites, Storm Warning, The Star, Beachhead, ou le stupéfiant The Monster and the Girl, qui viole allègrement plusieurs interdits du Code Hays. Sans oublier The Negro Soldier, documentaire incroyablement radical pour l'époque, écrit par Carlton Moss, auteur noir très engagé qui restera proche toute sa vie d'Heisler. Chabrol vantait la fluidité incisive de ses raccords, qui en faisait un des réalisateurs les plus élégants d'Hollywood. Il était très fier d'Among the Living et de ses recherches visuelles (la photo de Theodor Sparkhul est impressionnante), comme ce splendide premier plan où l'on découvre Susan Hayward retirant son chapeau et secouant ses cheveux. Le scénario de Cole et Fort, plus curieux, plus original que policé, mélange histoire policière sur fond de conflit social – influence de Cole, l'un des futurs dix de Hollywood – et conte gothique sur des jumeaux dont l'un, supposé mort, vit cloitré dans un vieux manoir sudiste. La description de ses dérapages criminels souvent provoqués par une pulsion sexuelle (comme le Steve Cochran de Storm Warning) inspire à Heisler des séquences très film noir qui flirtent aussi avec le fantastique. La manière dont les habitants basculent vers le lynchage offre des moments surprenants et forts d'une violence inattendue. Plusieurs personnes se font tabasser de manière gratuite, le juge est traîné dans le tribunal : « Jugez le et ensuite on le pendra ». Heisler revendique d'avoir changé l'optique du film en donnant beaucoup plus d'importance au frère fou (qui a des moments touchants, maladroits) qu'au héros, tous deux joués par Albert Dekker dont c'est le premier grand rôle. Il est sensationnel en meurtrier qui préfigure les névropathes peuplant le cinéma des années 50. Frances Farmer est vraiment belle et digne, et Harry Carey, excellent, joue un personnage plus sombre, plus noir qu'il n'y paraît.

Bertrand Tavernier