La Soif du mal

dimanche 26 juillet 2015, 17h00

Salle Henri Langlois

17h00 18h35 (95 min)

La Soif du mal Touch of Evil
Orson Welles
États-Unis / 1957 / 95 min / 35mm / VOSTF
D'après le roman Manque de pot de Whit Masterson.

Avec Charlton Heston, Janet Leigh, Orson Welles, Akim Tamiroff.

À la frontière entre les États-Unis et le Mexique, une bombe explose dans la voiture de l'homme qui tient la ville sous sa coupe. Le procureur mexicain Miguel Vargas décide de suivre l'enquête et découvre les méthodes peu orthodoxes de l'inspecteur américain Hank Quinlan.

Retour d'Orson Welles à Hollywood et dernier film américain. En ouverture, le plan-séquence le plus célèbre de l'histoire du cinéma. (Frédéric Bonnaud)

Tournage de nuit, en six semaines. Casting royal : Janet Leigh, Marlene Dietrich dans son dernier grand film, à contre-emploi en diseuse de bonne aventure, Charlton Heston auréolé du succès des Dix commandements, et Welles himself qui interprète le capitaine Quinlan. Rythme précis, caméra fiévreuse. Une explosion en guise d'exposition, qui plante avec intelligence le décor et installe les personnages. La photo somptueuse, aux noirs éblouissants, qui répond à la musique de Mancini, le long plan-séquence à la grue en ouverture, devenu une référence du genre... Et malgré tout, le semblant de retour en grâce de Welles auprès des studios est de courte durée : Universal n'aime pas le montage final et le remanie entièrement. Désavoué, Welles écrira un long plaidoyer pour défendre son travail, mais il faudra attendre près de trente ans après la sortie du film pour que le monteur Walter Murch livre une version enfin conforme aux intentions du cinéaste. Car loin de n'être qu'une nouvelle démonstration de la virtuosité de Welles, La Soif du mal parle politique, pouvoir et manipulation. Explore les frontières poreuses entre Mexique et États-Unis, entre le crime et la loi, entre l'illusion de la jeunesse et l'expérience désabusée. Mais surtout, c'est un film à tiroirs, qui contient et résume toute la complexité de son réalisateur, ses contradictions, ses passions, pour Shakespeare, pour l'art de l'illusion. Welles mêle le mélodrame au grotesque, triture à pleines mains la matière noire des polars traditionnels, dynamite les codes, s'aventure à grand renfort de plans audacieux dans les tréfonds de l'âme humaine, et l'essore pour en récolter la suprême noirceur. Un chef-d'œuvre, troublant et vénéneux.