À bout portant

mercredi 13 février 2013, 19h30

Salle Georges Franju

19h30 21h05 (95 min)

À bout portant The Killers
Don Siegel
États-Unis / 1964
D'après le roman The Killers d'Ernest Hemingway.

Avec Lee Marvin, John Cassavetes, Ronald Reagan, Angie Dickinson.

Deux tueurs à gages sont chargés d'exécuter un homme. Étonnamment, il ne leur résiste pas et se laisse abattre. Les deux assassins s'interrogent sur son comportement et enquêtent sur le vrai motif de leur mission.

Restauré par Universal Pictures, en collaboration avec la Film Fondation. Remerciements à Martin Scorsese et Steven Spielberg pour leurs conseils sur cette restauration.


Nouvelle adaptation d’Hemingway mais aussi remake actualisé des Tueurs, À bout portant avait été conçu pour la télévision, où travaillait le chef opérateur Richard L. Rawlings. Il en adopte le style sur-éclairé, qui donne à l’image une netteté coupante, où même les teintes chaudes sont finalement neutralisées dans un chromatisme métallique. Le générique, littéralement, annonce la couleur, avec ses images fixes, monochromes bleus ou rouges. Comme tous les grands films entérinant le vieillissement d’un genre, À bout portant oscille entre crudité naturaliste des actes et des motifs et fétichisation des figures (les poses et maniérismes des tueurs). Prenant systématiquement le contre-pied des options esthétiques de Siodmak, Don Siegel privilégie le prosaïsme de scènes diurnes où la violence s’affiche exacerbée (le ralenti subliminal du meurtre inaugural), où le Mal n’est plus figuré par les ténèbres mais par des cadrages obliques qui figurent le chaos d’une violence sèche, brutale ou gratuite. Quant aux lieux, ils deviennent quelconques voire ingrats, simples stock-shots de villes sans qualités, de circuits automobiles ou de routes poussiéreuses. Dans cette danse de mort, cette corrida menée comme l’enquête par les tueurs eux-mêmes, qui savent le temps compté, on meurt en pleine lumière. Et pourtant, comme dans Casablanca, les transparences affichées de la virée en bolide des amants disent, dans leur artifice même, l’authentique puissance de transfiguration d’un amour éphémère mais aussi hors du temps.

Serge Chauvin