Folies de femmes

mercredi 23 avril 2014, 18h00

Salle Jean Epstein

18h00

Folies de femmes Foolish Wives
Erich von Stroheim
États-Unis / 1922 / 117 min / 35mm / INT. ANG.

Avec Erich von Stroheim, Maude George, Mae Busch.

Aidé de ses deux complices féminines, Karamzin, faux aristocrate russe, s'installe à Monte-Carlo pour escroquer les casinos avec de faux billets, et tente de séduire la femme de l'ambassadeur des USA.

Folies de femmes, c'est la troisième réalisation d'Erich von Stroheim, le début de sa légende et de ses ennuis avec Irving Thalberg, le directeur de production d'Universal ; une œuvre d'une longueur alors inconnue, raccourcie d'autorité, amputée, réduite à quelque deux heures au lieu des six ou dix imaginées. Au vu de ce qu'il reste et cent ans après leur avènement, le film et son personnage principal parviennent encore à impressionner. Un personnage qui a tout d'un stigmate, celui d'une guerre monstrueuse accouchant d'une monstrueuse après-guerre. Folies de femmes, précis de décomposition, équivaut en cinéma au réalisme expressionniste du peintre Otto Dix, et le comte Karamzin (Stroheim) au chef-d'œuvre d'une époque morbide. Fabuleuse création que ce « comte », créature satanique rêvant de régner sur un pandémonium aux dimensions de Monte-Carlo. Et bien sûr, Folies de femmes est resté célèbre pour un décor (et un budget) défrayant la chronique de son temps, au point qu'on jurerait un film à la Griffith s'il ne ressemblait à son envers, le mélo épique remplacé par sa satire. Stroheim va si loin dans la reconstitution de ce quartier de Monaco que son réalisme, poussé à un paroxysme, se retourne et dévoile le leurre. Comme la Côte d'Azur dans La Main au collet d'Hitchcock (1955), autre cinéaste du monumental, Monte-Carlo apparaît non dans sa réalité mais dans sa vérité, immense façade de studio, festival du trompe-l'œil, lieu du faux : faussaires, identités costumées et fardées, amabilités faisandées du théâtre social et simili romantisme, jusqu'aux larmes du comte quand il extorque à sa servante ses maigres économies dans une scène d'anthologie. Et derrière la façade, un monde de pulsions.

Bernard Benoliel

Restauration par le San Francisco Silent Film Festival, à partir d'une copie nitrate 35 mm de la Cineteca italiana de Milan, et d'une copie 35 mm du Museum of Modern Art de New York. Teintages et virages réalisés selon les conventions de colorisation d'Universal de l'époque. Pour réaliser les effets colorisés à la main, les équipes se sont référé à des revues contemporaines et à un article de presse spécialisée écrit par le coloriste d'origine, Gustav Brock.