Jeanne Dielman, 23, quai du Commerce 1080 Bruxelles

Jeanne Dielman, 23, quai du Commerce 1080 Bruxelles

Chantal Akerman
Belgique-France / 1975 / 201 min

Avec Delphine Seyrig, Henri Storck, Jacques Doniol-Valcroze.

Jeanne fait des passes à domicile, et survit dans une sorte d'indifférence, entre ce rituel lucratif et l'épluchage de pommes de terre. Le sujet et le parti pris esthétique d'Akerman se fondent sur l'exténuation d'une vie et un épuisement plastique revendiqué. Les cadrages, les infimes mouvements d'appareil et l'impassibilité de Delphine Seyrig imprègnent le banal appartement d'une inquiétante familiarité freudo-hitchcockienne, qui doit aussi beaucoup au travail, virtuose, sur la lumière.

Jeanne fait des « passes à domicile » et c'est ce qui lui permet de survivre dans une sorte d'indifférence, prise qu'elle est entre ce rituel sexuel lucratif et l'épluchage de pommes de terre. Le sujet et le parti pris esthétique de Chantal Akerman se fondent sur l'épuisement, exténuation d'une vie d'une part et épuisement plastique d'autre part revendiqué à une époque où l'art conceptuel est aux postes de commande des autres arts. La puissance du film est intacte aujourd'hui car son ambition fut de donner l'illusion que le déroulement diégétique correspondait au dévidement du temps réel. Pourtant, les cadrages, les infimes mouvements d'appareil et l'impassibilité de Delphine Seyrig parviennent contre toute attente à imprégner le banal appartement d'une « inquiétante familiarité » freudo-hitchcockienne. Si le film opère, quarante années plus tard, un tel effet dramatique et visuel, et dont la restauration récente accentue encore l'efficience, c'est au travail de lumière qu'on le doit également. L'invention de Chantal Akerman se loge pour partie dans cette virtuose utilisation de la lumière du jour qui change lentement et les formes variables que projettent les lumières artificielles de la ville de laquelle Jeanne s'isole.

Dominique Païni

Restauré par la Cinémathèque royale de Belgique à partir du négatif original caméra couleur 35 mm, confié par Chantal Akerman.


Générique

Réalisateur : Chantal Akerman
Assistants réalisateurs : Marilyn Watelet, Serge Brodsky, Marianne deMuylder
Scénariste : Chantal Akerman
Dialoguiste : Chantal Akerman
Sociétés de production : Paradise Films (Bruxelles), Unité Trois (Paris)
Producteurs : Evelyne Paul, Alain Dahan
Distributeur d'origine : Olympic Distribution
Directeur de la photographie : Babette Mangolte
Cadreur : Bénédicte Delesalle
Ingénieurs du son : Benie Deswarte, Françoise Van Thienen
Mixeur : Jean-Paul Loublier
Décorateurs : Philippe Graff, Jean-Paul Ferbus
Costumier : Philippe Graff
Maquilleur : Eliane Marcus
Monteur : Patricia Canino
Script : Danae Maroulacou
Interprètes : Delphine Seyrig (Jeanne Dielman), Henri Storck (le premier client), Jacques Doniol-Valcroze (le deuxième client), Yves Bical (le troisième client), Jan Decorte (Sylvain Dielman)