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Dernier film muet de Dziga Vertov, L'Homme à la caméra aurait tout aussi bien pu s'intituler, comme son premier film sonore, Enthousiasme : son art du montage, musical, fondé sur des assonances visuelles, est à son apogée. Il s'agit de montrer une société transformée par le communisme et, ainsi, de donner corps à une utopie. L'Homme à la caméra montre le cinéma en train de se faire. L'opérateur et frère du cinéaste, Mikhaïl Kaufman, tourne avec passion. Il enregistre la « vie à l'improviste », selon la célèbre formule de Vertov, pour rester au plus près des faits et « montrer les gens sans masque », souvent en les filmant à leur insu. Le film se déploie en trois parties. Dans la première, dédiée au repos et au sommeil, Vertov montre essentiellement des mannequins inanimés dans une ville endormie. Suit un long développement sur la société soviétique mise en éveil par le travail. Comme dans les photographies et collages de son ami Alexandre Rodtchenko, machines, engrenages, visages et corps jeunes sont à l'honneur. La force de Vertov est de capter le quotidien et l'action : la circulation des tramways, des foules, des calèches et des voitures ou le travail dans les mines, autant de scènes qui dépeignent une société gagnée par un entrain. Dans la dernière partie, dédiée aux loisirs, Vertov filme des corps athlétiques et performants au ralenti, mais aussi, en gros plans, des visages de spectateurs enjoués. Des images qui disent l'organisation parfaite de la société.
Pauline de Raymond