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Conservé et restauré par le MoMA et le Musée Andy Warhol.
Dans les sixties, les stars underground de la Factory logeaient à l’année au Chelsea Hotel, décor réel de La Vie : mode d’emploi version new-yorkaise. Le film de Warhol et Morrissey nous emmène d’une chambre à l’autre en une vertigineuse succession de visites de politesse, de courtoisie. Tels des acteurs passant un screen test sur la scène minuscule de leur logement, tous les pensionnaires mêlent le théâtre et la vie quotidienne devant l’œil impassible de la caméra : Nico, la froide chanteuse germanique de l’album éponyme, a l’honneur d’ouvrir et de clôturer le bal (elle coupe longuement sa blonde frange au début, elle pleure sur son lit à la fin). Gerard Malanga manie son fouet. La truculente Brigid Polk s’énerve au téléphone. La sublime Mary Woronov, aka Hanoi Hannah, sadise ses amies. Ondine, réincarné en pape, se shoote, pérore et confesse des égéries, pendant qu’en fond sonore le Velvet joue quelques accords déglingués.
Le split screen nous introduit simultanément dans deux chambres qui deviennent ainsi mitoyennes, en une sorte de montage permanent où les coïncidences abondent et déréalisent l’espace projeté : deux lits où tout le monde parle, deux visages en gros plan, deux images abstraites, saturées de couleurs par ce même light show utilisé par Warhol pour les concerts de l’Exploding Plastic Inevitable, aka Velvet Underground.
Le lit, les cheveux, le miroir sont les leitmotivs désinvoltes et futiles de ce temps perdu restitué par le cinéma : I’ll Be Your Mirror… Comme dans Sleep ou Couch, Warhol en miroir vampirique. Et c’est comme si toutes les chambres du Chelsea étaient équipées d’un miroir sans tain derrière lequel le cher Andy filmait.
Brice Matthieussent