Spartacus Duels

Stanley Kubrick a toujours considéré Spartacus comme son film le moins personnel, mais cette scène de combat lui permet d'exprimer une double violence : celle que les riches Romains infligent aux gladiateurs en s'offrant une lutte à mort, et celle du combat entre les gladiateurs qui luttent pour leur survie.

Les cadrages, minutieusement étudiés, servent ces deux points de vue où priorité est donnée aux personnages. Stanley Kubrick exploite l'écran large (Super Technirama 70) pour disposer dans un même plan les combattants au sol, dans l'arène, les spectateurs à l'étage, les patriciens dans la loge, et Varinia et Batiatus de part et d'autre. Le cinéaste joue avec les couleurs des vêtements : les esclaves se fondent dans la couleur de la terre et du bois de l'arène alors que les Romains se distinguent avec leurs costumes colorés et vifs, chacun tranchant sur un ciel uniformément bleu.

Le combat ne dure que trois minutes entre l'Éthiopien Draba et le Thrace Spartacus. La caméra adopte alternativement le point de vue dominant et statique des Romains (vue plongeante) et un point de vue opposé en se posant près des gladiateurs en mouvement (vue en contre-plongée). Ces derniers plans, en contre-plongée, partent du ras du sable de l'arène, du bruit des armes, des coups et de la sueur des combattants avec, au loin, le regard des Romains. La violence est tactile, charnelle. Parfois la caméra s'élève au-dessus des Romains qui profitent du spectacle. Le duel n'est qu'un jeu pour eux : les hommes, distraits, parlent politique, alors que les femmes, sans pitié pour les combattants, commentent la lutte. La violence est plus cruelle encore, alors même qu'elle semble tenue à distance.