Ouverture de la billetterie le 24 août à 11h
Jusqu'aux années 1960, il y eut plus de réalisatrices en URSS que dans aucun autre pays. Ce n'est peut-être pas une simple note en bas de page de l'histoire, mais une question politique. L'accès des femmes aux moyens de production – par exemple du cinéma –, la remise en question de la division du travail par genres, ne se fait pas « naturellement », progressivement, mais est un processus révolutionnaire, qui se heurte à de fortes résistances et retours en arrière.
Pionnières du cinéma soviétique
Les femmes se trouvent dirigées vers des professions « typiquement féminines » (actrice, monteuse, scénariste) pour être reconnues. Elles sont souvent spécialisées dans les films pour enfants, les documentaires ou les courts métrages, souvent encore présentées comme « la femme de » dans l'ombre de leur prestigieux conjoint, et donc sans autonomie dans des histoires du cinéma écrites après coup (ainsi plus réactionnaires que dans les années de la révolution), histoires qui attribuent sans scrupule les films à « lui » seul, quand ils ont été faits à deux, voire par « elle » seule. S'il a fallu omettre à regret Elizaveta Svilova and Ioulia Solntseva, qui avaient choisi d'être les premières collaboratrices de Dziga Vertov et d'Alexandre Dovjenko, cette rétrospective est l'occasion de réévaluer Véra Stroïeva, épouse de Grigori Rochal, et de confirmer les talents multiples d'Alexandra Khokhlova, indépendamment de sa vie et de son travail avec Lev Koulechov. Le fait de pouvoir nommer, avant 1947, plus de dix réalisatrices importantes de longs métrages, autant de documentaristes et quelques animatrices, montre le fort impact de la révolution dans un pays auparavant supposé plus arriéré que l'Europe occidentale.
De la plus connue, Olga Preobrajenskaïa, réalisatrice dès avant la révolution, on connaît un des films féministes de la fin des années 1920, Les Femmes de Riazan (Baby riazanskie), grand succès en France sous le titre Le Village du péché. Margarita Barskaïa a réalisé un chef-d'œuvre, Souliers percés (Rvanye bachmaki), plus avec des enfants que pour les enfants, et le splendide Père et fils (Otets i syn), mutilé et jamais vu. Son destin tragique (elle se suicide en 1939) ne doit pas laisser son talent dans l'ombre. C'est vrai aussi de la Géorgienne Nutsa Gogoberidze, dont la carrière, après deux films étonnants récemment exhumés, Buba (1930) et Ujmuri (1934), fut brutalement interrompue par dix ans d'exil. Elle est à l'origine d'une dynastie de réalisatrices avec sa fille, Lana Gogoberidze, et sa petite-fille, Salomé Alexi, à qui on doit la restauration de ses films. Esther Choub est quant à elle reconnue comme créatrice du film de montage, mais on peut penser que son meilleur film est Komsomol à la tête de l'électrification (K.Ch.E. : Komsomol, chef elektrifikatsii), qui ne fait pas appel aux documents d'archives.
Il y a enfin la surprise de découvrir des films de femmes qui ont battu des records d'entrées, comme ceux de Nadejda Kocheverova, Arinka (1939, 23 millions de spectateurs) et Cendrillon (Zolouchka, 1947, 18 millions), ou de Tatiana Loukachévitch, L'Enfant perdu (Podkidych, 1939, 17 millions). Un cas sans précédent, sauf erreur – enfin, jusqu'à Kathryn Bigelow...
Cantonner les femmes aux films pour enfants et aux documentaires n'était pas une situation idéale, mais vu l'importance de ces genres dans le cinéma soviétique, on pourrait retourner l'argument.
Irène Bonnaud, Bernard Eisenschitz
Dans les salles
Films, rencontres, conférences, spectacles
Du 14 au 29 octobre 2020
Les films
- Affaire des fermoirs (L') Aleksandra Khokhlova / URSS / 1929 CM Ma 20 oct 17h30 Di 25 oct 17h00
- Buba Nutsa Gogoberidze / URSS / 1930 CM Ve 23 oct 17h30 Ma 27 oct 18h00
- Cendrillon Nadejda Kocheverova, Mikhaïl Chapiro / URSS / 1947 Di 18 oct 17h30 Ve 30 oct 16h45
- Gavroche Tatiana Loukachevitch / URSS / 1937 Lu 19 oct 15h00 Sa 24 oct 16h30
- Génération des vainqueurs Vera Stroïeva / URSS / 1936 Je 22 oct 18h00 Je 29 oct 15h00
- Kachtanka Olga Preobrajenskaïa / URSS / 1926 Lu 19 oct 17h00 Ma 27 oct 15h30
- Komsomol à la tête de l'électrification Esther Choub / URSS / 1932 Je 22 oct 16h00 Lu 26 oct 18h00
- Père et fils Margarita Barskaïa / URSS / 1936 Ve 23 oct 15h30 Je 29 oct 18h30
- Sacha Aleksandra Khokhlova / URSS / 1930 Ma 20 oct 17h30 Di 25 oct 17h00
- Souliers percés Margarita Barskaïa / URSS / 1933 Me 14 oct 20h00 Lu 26 oct 16h00
- Ujmuri Nutsa Gogoberidze / URSS / 1934 Ve 23 oct 17h30 Ma 27 oct 18h00
- Vavila le terrible et tante Arina Nikolaï Khodataïev, Olga Khodataïeva / URSS / 1928 CM Lu 19 oct 15h00 Sa 24 oct 16h30

- Souliers percés Margarita Barskaïa

- Vavila le terrible et tante Arina Nikolaï Khodataïev, Olga Khodataïeva CM
- Gavroche Tatiana Loukachevitch
- Kachtanka Olga Preobrajenskaïa
- Komsomol à la tête de l'électrification Esther Choub

- Génération des vainqueurs Vera Stroïeva
- Père et fils Margarita Barskaïa

- Buba Nutsa Gogoberidze CM
- Ujmuri Nutsa Gogoberidze
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