Parlons cinéma avec... Olivier Assayas
Du 13 au 27 juin 2024
Je ne sais pas quels sont mes films préférés. Il y en a trop, et souvent je les ai oubliés. En général, je les ai découverts il y a longtemps et même si je me souviens qu'ils ont résonné en moi d'une façon différente des autres, je ne sais plus bien comment je les recevrais aujourd'hui. Ils persistent à habiter mes rêveries, mais est-ce bien eux, ou est-ce l'idée que je me fais d'eux, la façon dont je les ai transformés, à force de vivre avec leur souvenir ? À chaque âge, périodiquement, on redécouvre le cinéma. Et la porte doit rester ouverte, toujours, pour faire circuler l'air, circuler les films, dans le vortex de notre imagination, nous-mêmes réinventés, renouvelés par de nouvelles questions posées par de nouveaux films, que d'ailleurs on n'aime pas forcément de prime abord, mais qui nous touchent au point le plus sensible. Et puis il y a encore d'autres films, d'une autre nature. Je n'aime pas revoir les films, j'aime les découvrir et puis bouger. Ceux-là je les ai revus. À tous les âges. Je les ai redécouverts et j'ai poursuivi avec eux au-delà des années un dialogue parfois serein, parfois plus trouble. J'ai été fasciné, ils se sont inscrits en moi, mais par période il m'est aussi arrivé d'en douter, douter d'eux et douter de moi. En tout cas, ce n'est pas d'histoire du cinéma qu'il s'agit, plutôt de cette façon mystérieuse dont les films nous révèlent à nous-mêmes, où l'art et la vie se mêlent. Ils sont un miroir où l'on se reconnaît, mais qui nous dit aussi combien nous avons changé. Des films qui mesurent le passage du temps, sur eux et sur nous, indistinctement.
Olivier Assayas