Les 20 ans de l'ACID

Du 16 au 27 mai 2012

L’Association du Cinéma Indépendant pour sa Diffusion a 20 ans

« Pourquoi avons-nous besoin de tant d’histoires, de tant d’images ? Pourquoi ce désir d’être assis dans l’obscurité, de fixer l’écran où d’autres vivent, sans que nous puissions répondre à leurs paroles, nous mêler à leurs actes ? Pourquoi sommes-nous si sensibles à ces vies qui nous échappent ? Pourquoi rions-nous ? Pourquoi pleurons-nous ? La réponse semble évidente : parce que le cinéma est un art. Pourtant cette évidence est aujourd’hui violemment combattue, renvoyée au grenier poussiéreux des illusions, voire des utopies, niées par l’économie actuelle du cinéma. Aujourd’hui, l’essentiel des recettes se concentre sur de moins en moins de films capables, par leur puissance financière, d’occuper une partie si importante de la surface commerciale que tous les autres films sont repoussés dans une périphérie géographique et économique leur interdisant, de fait, de rencontrer leur public (…). (…) Il s’agit donc pour les cinéastes de résister, de ne pas se laisser imposer une morale qui n’est pas la leur : une morale qui ne pense qu’en termes de classement, de hiérarchie, d’exclusion, d’argent. Depuis toujours dans le cinéma français la marge et le centre sont intimement liés, indissociables. Toucher l’un, c’est atteindre l’autre. Henri Langlois avait fondé sa morale sur l’idée que « tous les films sont égaux ». Il n’en est pas d’autre qui vaille. Il s’agit donc pour les cinéastes de résister. Résister en donnant une vraie chance à tous les films d’être vus. »

Extrait du Manifeste Résister, signé en novembre 1991 par 180 cinéastes

Il y a 20 ans, en 1992, l’ACID naît suite à ce manifeste.

C’est avec la conscience du besoin de formes cinématographiques multiples et la conviction de la valeur de ce qui dure, de ce qui fait sens avec le temps, que des cinéastes fondent l’ACID. Ils imaginent un outil pour créer un lien entre cinéastes, distributeurs, exploitants et spectateurs, afin d’aider des films issus d’une création indépendante à atteindre leur public. Ils soutiennent les films d’autres cinéastes, convainquent des distributeurs et des exploitants de s’intéresser à ces films. Ils inventent alors de nouvelles manières de faire : pré-visionnements en régions pour les programmateurs, accompagnement des films par les cinéastes, rédaction de textes… Ils proposent au CNC des mécanismes d’aides à la distribution et à l’exploitation des films indépendants. Dès 1993, l’ACID décide d’être également présente au Festival de Cannes : une programmation parallèle d’œuvres indépendantes, souvent sans distributeur, réunit les cinéastes qui soutiennent et ceux qui sont soutenus, stimulantes rencontres accompagnées d’échanges passionnés. Ce sont ainsi 450 films qui, en 20 ans, ont été choisis et présentés aux quatre coins de la France et du monde par des cinéastes convaincus de la nécessité de regarder là où les autres ne veulent ou ne peuvent pas regarder, et de l’importance à long terme de ce geste-là. Aujourd’hui, ce geste n’a rien perdu de sa nécessité. Les chiffres mirobolants de la fréquentation cinématographique cachent une concentration massive, des difficultés accrues de production et de diffusion pour les œuvres les plus audacieuses. Un discours récurrent sur un trop grand nombre de « petits films » ne laisse plus de place à la valeur artistique et patrimoniale du cinéma. Face à cette situation, il est plus que jamais indispensable de continuer à regarder à côté, ailleurs, en toute indépendance. La Cinémathèque et l’ACID vous invitent aujourd’hui à fêter 20 ans de films, 20 ans de regards libres, 20 ans de liens entre cinéastes et publics, avec une programmation de premières œuvres, les premiers pas d’une trentaine de cinéastes. Fiction, documentaire, essai, expérimental : au cours de ces 20 ans, les cinéastes présents à l’ACID ont toujours choisi les films avec une seule règle : le coup de cœur…

Cet hommage s’ouvre avec l’un des tout premiers films défendus par l’ACID, Parfois trop d’amour de Lucas Belvaux. C’est donc à lui que nous laissons le mot de la fin en ne résistant pas au plaisir de vous faire partager un de ses textes écrit en 1994…

Les cinéastes de l’ACID

Second souffle et cinquième acte.

Le film est fini.
Fin de la première époque et premier bilan.

  1. Je suis fier, fier d’avoir fait un film qui ressemble à ce que j’avais imaginé et fier d’avoir tenu mes engagements, de n’avoir pas dépassé le temps qui m’était accordé donc le budget.
  2. Je suis fatigué.
  3. Tout reste à faire.

Deuxième époque. Un an après. L’impression étrange que chaque étape dure un an. Un an qui passe où rien ne se passe. Douze mois de confusion, de solitude aussi.
Quinze personnes ont vu le film, dix l’ont aimé. Fin du coup.
Ce film, mon film, est en train d’en rejoindre tant d’autres à la fosse commune.
C’est l’époque d’une nouvelle question qui m’obsède : « À quoi bon faire un film aujourd’hui ? ». Pas de réponse.
Combien sommes-nous à avoir eu cette expérience, sans s’en parler, éclatés géographiquement, moralement ?
Heureusement, c’est aussi l’époque d’une nouvelle rencontre, car une poignée décide que ça suffit et invente, rêve, organise.
C’est la naissance d’un réseau qui va à la rencontre d’autres réseaux.
Je sombrais dans le coma, et c’est l’ACID qui me réveille, qui réveille le film plutôt mais c’est tout comme, car c’était aussi l’époque où je ne faisais plus la différence entre mon film et moi (ce qui est dangereux), l’aimer c’était m’aimer et vice versa.
Nous avions décidé, avec Michel David, de distribuer le film nous mêmes, mais sans le soutien et le travail énergique de l’ACID, jamais nous n’y serions parvenu.
Aujourd’hui, Parfois trop d’amour est sorti, il est montré, il est vu, je peux enfin passer au suivant.
Merci à l’ACID, donc, et à chacun de ses membres, sans qui cette histoire, n’aurait jamais fini, grâce à qui d’autres histoires ont eu leur happy end.
Les films sont faits pour les salles, les salles pour les films, ça en fait des histoires d’amour…

Lucas Belvaux, 1994

Les films

Dancing
Patrick Mario Bernard, Pierre Trividic, Xavier Brillat , 2002
Lu 21 mai 20h30   JE
Donoma
Djinn Carrénard , 2010
Sa 26 mai 21h00   GF
Quand la mer monte
Gilles Porte, Yolande Moreau , 2003
Di 27 mai 17h00   GF
Robert Mitchum est mort
Olivier Babinet, Fred Kihn , 2009
Lu 28 mai 14h30   HL

Partenaires et remerciements

Tous les cinéastes dont les films sont présentés.
ACID , Agat Films, Alain Raoust, Arte France, Capricci, Haut et court, Les Films de la Croisade, Commune Image Media & Donoma Guerilla, Diaphana, GMT Productions, Jean-Claude Rousseau, Laurent Salgues, Les Films du Losange, Les Films du Paradoxe, Magouric Productions, Memento Films, Ostinato Production, Pyramide Distribution, Quark Productions, Shellac, Tadrart Films.

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