Séoul-Paris, une fraternité féconde

3 février 2025

Pour nous, Archives du film coréennes (KOFA), c'est un véritable honneur que de voir nos restaurations présentées dans l'édition 2025 du Festival de la Cinémathèque. Nous avons célébré notre 50e anniversaire l'année dernière, et cette reconnaissance par une institution de renommée mondiale, l'une des organisations fondatrices de la FIAF (Fédération internationale des archives du film, dont nous sommes membres depuis 1985), donne un sens particulièrement important à notre travail. Depuis leur création en 1974, les Archives du film coréennes jouent un rôle majeur dans la préservation du cinéma national. Au fil des décennies, nous avons développé nos compétences pour que le cinéma coréen soit préservé dans les meilleures conditions possibles, et pour qu'il soit accessible aux cinéphiles, aussi bien en Corée que dans le monde entier. Nous nous évertuons à maintenir le cinéma coréen classique bien vivant, ce dont témoigne la présente sélection.

L'Arche de la chasteté (1962), le classique de Shin Sang-ok, a longtemps disparu, jusqu'à ce qu'une copie soit retrouvée à l'Institut du film et de l'audiovisuel de Taïwan (TFAI) en 2004. Cette découverte met en lumière les efforts des Archives du film coréennes pour retrouver les pièces manquantes dans l'histoire du cinéma coréen, et la coopération féconde entre les différentes archives cinématographiques pour y parvenir. Ce film constitue également le tout premier projet de restauration numérique de la KOFA, un jalon déterminant, qui a depuis ouvert la voie à la restauration de plus de 110 films. Une balle perdue (1961) de Yoo Hyeon-mok, peut-être l'un des plus grands films coréens jamais réalisés, est notre projet de restauration le plus ambitieux à ce jour. Les seuls documents existants provenaient d'une copie sous-titrée en anglais ; un projet de deux ans, impliquant plusieurs sociétés d'effets visuels, a donc été lancé pour retirer méticuleusement les sous-titres de chaque image, grâce au numérique. Une première pour un film entier, et une tâche monumentale qui a été une réussite. The Widow (1955) de Park Nam-ok occupe une place capitale dans l'histoire du cinéma : il s'agit du premier film coréen réalisé par une femme. Sa nature incomplète en est d'autant plus tragique : la dernière bobine est considérée comme perdue, et les dix minutes restantes sont dépourvues de son. Ce qui nous rappelle avec solennité que notre travail est loin d'être achevé, même si le film conserve encore toute sa force et reflète le talent de sa réalisatrice. Une ville natale (1949) de Yoon Yong-gyu correspond à de nombreuses premières fois : première œuvre bouddhiste de l'histoire du cinéma coréen, l'un des premiers films inscrits au patrimoine culturel national. Et un lien fort avec la France, puisqu'il a fait partie des premières projections d'échanges culturels entre les deux pays, en 1950. Notre sélection sera complétée par des restaurations récentes d'œuvres extraordinaires, signées par deux auteurs coréens des plus estimés : Festival de Im Kwon-taek et Le Jour où le cochon est tombé dans le puits de Hong Sang-soo, tous deux sortis en 1996.

Au cours des deux dernières décennies, la Cinémathèque française a accueilli plusieurs rétrospectives marquantes consacrées au cinéma coréen, auxquelles nous sommes fiers d'avoir participé. Même si cette sélection de six films n'a pas la même ampleur, nous espérons qu'elle donnera un aperçu de l'univers remarquable du cinéma coréen, et de la passion que nous lui vouons.

Young Jin Eric Choi

Programmateur aux Archives du film coréennes