Échanges fraternels

Kieron Webb - 8 février 2023

C'est avec un immense plaisir que nous sommes invités à participer à ce merveilleux festival. Une forme de parenté unit le BFI National Archive et la Cinémathèque française : nées à un an d'intervalle, les deux institutions fêteront leur centenaire dans la décennie à venir, et elles sont toutes deux à l'origine de la Fédération internationale des archives du film (FIAF), à laquelle elles contribuent avec force et passion.

The Private Life Of Henry VIII BFI Hommage

L'Histoire s'est trop longtemps attardée sur la rivalité et les divergences entre les fondateurs des deux institutions, Lindgren et Langlois. Désormais, leurs idées communes apparaissent plus clairement. La seule similitude entre leurs patronymes constitue déjà un signe. Et après tout, ce sont les recherches de Langlois, enquêtant auprès de Lindgren en 1954 sur les tirages des films Lumière, qui ont inspiré Harold Brown, le premier conservateur en chef du BFI, pour la fabrication de sa tireuse Mark IV. Les restaurations menées par les deux archives ont considérablement bénéficié des divers échanges de sources, depuis les tirages nitrate de L'Atalante jusqu'à The Pleasure Garden de Hitchcock, notamment.

Le BFI National Archive, principal organisme du Royaume-Uni dédié au cinéma, rassemble la collection nationale de films et de productions télévisées, conservée en plusieurs endroits : le Master Film Store (Warwickshire), où sont stockés les films à -5 °C et 35 % d'hygrométrie ; le Conservation Center (Hertfordshire), consacré à l'entretien des collections, avec un laboratoire de traitement des films en noir et blanc ; et le BFI Southbank Center, avec la Reuben's Librarys dotée de salles de lecture et d'un petit espace d'exposition destiné aux collections spéciales.

Les collections s'étendent du court métrage The Derby (Birt Acres, 1895) aux dernières productions britanniques signées Netflix. Le cinéma muet, particulièrement bien représenté, comprend productions européennes et américaines, de très nombreux films provenant de Chine et du Japon, ainsi que la plus importante collection au monde de films documentaires tournés en Inde avant l'Indépendance, soit au total quelque 40 000 films de fiction et 140 000 films de non-fiction. La production télévisuelle britannique est conservée et mise à disposition depuis les années 1950, et représente 800 000 programmes. Nos collections spéciales renferment un trésor extrêmement riche de 19 000 affiches, 600 magazines, 28 000 press books, 21 000 scénarios et 5 000 dessins. Les collections numériques représentent quant à elles plus d'1,6 million d'images fixes. Nous nous occupons également de deux collections inscrites au Registre de la Mémoire du monde de l'UNESCO : la collection Mitchell et Kenyon, soit 28 heures de négatifs originaux datant de l'ère édouardienne (1901-1904), et le travail précurseur de la GPO Film Unit dans les années 1930.

Les cinq films sélectionnés pour le festival offrent un aperçu des derniers travaux de restauration effectués par le BFI. Nous avons tout particulièrement souhaité illustrer notre intérêt sans cesse renouvelé pour les différentes formes narratives, les différents supports et leur diversité, tant pour l'image que pour le son. De l'utilisation subtile du 16 mm par Gary Oldman et Peter Wollen à la magie du Technicolor de la fin des années 1960, de l'impact majeur du traitement sans blanchiment au travail complexe sur le son des studios Denham : cette sélection offre une vue d'ensemble de tout le Royaume-Uni à travers le temps.

Kieron Webb


Kieron Webb est responsable de la conservation aux Archives nationales du BFI. Il dirige les laboratoires de photographie et de films numériques et supervise les projets de restauration des Archives. Il a travaillé à la restauration des premiers films de Charlie Chaplin, Alfred Hitchcock et David Lean, ainsi qu'à celle de I Know Where I'm Going! de Powell et Pressburger (1945), et les sorties numériques de Napoleon (1927) et Naked (1993).