Revue de presse de « Complot de famille » (Alfred Hitchcock, 1975)

Hélène Lacolomberie - 12 novembre 2019

Le 53ème et dernier film d’Alfred Hitchcock est tout entier une manière de clin d’œil. À son œuvre passée, au spectateur, et au septième art.

Complot de Famille

Car « Complot de famille n’est pas un film sérieux. Ce n’est même pas un vrai policier » note Télérama. C’est un film souriant et malicieux. « On y rit un peu, on y sourit beaucoup, tant l’humour du vieux maître s’infiltre dans les moments les plus dramatiques » explique L’Aurore pour qui Hitchcock « semble avoir pris le parti de rire de ses angoisses enfin sublimées ». À aucun moment il ne se prend au sérieux, et Le Figaro souligne qu’il est « impossible de se moquer avec plus d’esprit de soi-même et des autres ». Humour omniprésent donc, mais aussi charme particulier au parfum un peu désuet et « inimitable des œuvres de vieillesse » savoure Le Nouvel Observateur, conquis par ce « testament-canular aux allures d’épure » tandis qu’à l’opposé Le Coopérateur de France juge que « le grand atout du film, c’est sa jeunesse d’esprit et sa vitalité ».

Complot de famille n’est pas non plus un policier de facture classique mais bien plutôt « une comédie d’aventure sans mort violente, avec un rien de poésie ensoleillée » estime L’Aurore. Le film constitue un véritable « pot pourri des obsessions hitchcockiennes » qui défilent à travers un scénario des plus rocambolesques, voire sans queue ni tête selon certains. C’est l’occasion pour Alfred Hitchcock de développer allègrement le chapelet de ses thèmes favoris, « depuis la substitution d’identité jusqu’au conflit avec le mal » précise L’Humanité. Résultat, une savoureuse compilation de ses œuvres antérieures et un « véritable petit traité de cinéma hitchcockien » (Le Journal du Dimanche).

Cette farce énorme repose sur une construction en chassé-croisé qui s’apparenterait presque à une équation mathématique, « une histoire double dont les lignes de force se déplacent parallèlement et se croisent » explique L’Aurore. En guise d’introduction, Hitchcock fait le pari risqué d’une scène d’exposition inhabituelle. « Il nous impose dix minutes de champ-contre champ » s’amuse La Croix, et France Soir reconnaît que « le film démarre lentement [avec] un exposé laborieusement théâtral ». Nouvelle démonstration de la virtuosité du maître, Complot de famille propose pêle-mêle une poursuite en voiture, une autre dans un cimetière, et un superbe plan à la grue. Et n’oublions pas de mentionner les acteurs : « chacun est à sa place et tient son rôle avec conscience, talent et efficacité » apprécie Bien Public. Ce qui n’a pourtant pas suffit pour séduire L’Express qui, seul, boude une intrigue « qui semble tout droit sortie de quelque poussiéreux roman d’avant-guerre », entraînant « deux heures d’un intérêt somnolent ».

Complot de famille est donc un pur Hitchcock pour hitchcockiens, l’un des meilleurs morceaux de son œuvre. Et, conclut L’Aurore, « au terme de sa carrière, Hitchcock, sachant qu’il n’a pas grand chose à prouver, peut prendre le temps de flâner avec la mort ». Enfin.


Hélène Lacolomberie est rédactrice web à la Cinémathèque française.