Le Caporal épinglé

lundi 12 novembre 2018, 19h00

Salle Georges Franju

19h00 21h45 (165 min)

Jean Renoir
France / 1962 / 105 min / 35 mm
D'après le roman Le Caporal épinglé de Jacques Perret.

Avec Jean-Pierre Cassel, Claude Brasseur, Claude Rich, Jean Carmet.

En 1940, prisonniers de guerre dans un stalag allemand, le Caporal et Peter tentent, de façon aussi répétée qu'infructueuse, de s'évader.

Tourné en 1962, Le Caporal épinglé sera le dernier film pour le cinéma de Jean Renoir. C'est Charles Spaak, le scénariste de La Grande illusion, qui parle au cinéaste du livre de Jacques Perret paru en 1947. L'écrivain y évoquait, avec une certaine verve, ses souvenirs de prisonnier de guerre en Allemagne. Pour Spaak, ce pourrait être l'occasion de reprendre avec Renoir le sujet de La Grande illusion, mais « sans illusion » cette fois. C'est très exactement ce programme que Renoir va suivre en racontant, aidé en cela par toute une jeune génération de comédiens en devenir, les tentatives d'évasion de quelques troufions emmenés en Allemagne après la défaite de 1940, dans un film qui fut souvent, et hâtivement, considéré comme une sorte de remake de son chef-d'œuvre de 1937. Car ici, Renoir délaisse la dialectique de la classe et de la nationalité pour s'interroger sur le concept de liberté en soi. C'est dans la boue et la servitude, dans le risque, parfois mortel, de tel ou tel choix, que s'éprouve véritablement la liberté des individus, qui a ici remplacé la question de l'émancipation collective et sociale. Le réalisme renoirien apparaît alors comme une manière de dénoncer le réconfort illusoire de l'imaginaire. Le Caporal épinglé ne semble-t-il pas l'illustration cinématographique parfaite de la phrase de Sartre, écrite dans Les Lettres françaises en 1944 : « Jamais nous n'avons été plus libres que sous l'occupation allemande. »

Jean-François Rauger

Restauration et numérisation en 4K par StudioCanal en 2021 chez Hiventy, avec la participation du CNC. Négatif 35 mm original scanné en 4K par immersion car présentant de profondes rayures. Les multiples altérations de la pellicule ont été atténuées ou retirées.


Autour du « Caporal épinglé »
Dialogue avec Jean-François Rauger
60 min

Jean-François Rauger présentera Le Caporal épinglé, une projection suivie d'une discussion sur un film reprenant et retravaillant l'un des motifs du cinéaste, c'est-à-dire qui refait en apparence La Grande Illusion pour se livrer en vérité à une méditation sur la notion de liberté individuelle, côtoyant ainsi le paradoxe sartrien selon lequel les Français n'auraient jamais été aussi libres que pendant l'Occupation.

« Le Caporal épinglé est un film de personnages, beaucoup plus qu'un film de décor. Mes héros portent leur vérité en eux. Il y a aussi un léger suspense dans la découverte des caractères. On ne sait pas très bien qui sont ces gens, s'ils sont lâches, courageux, etc. D'ailleurs, on ne le sait toujours pas à la fin. Souvent ainsi, les gens meurent sans que l'on sache qui ils ont été. » (Jean Renoir, 1962)

« J'ai un plan, le meilleur de tous. Celui qui consiste à ne pas en avoir. » (Ballochet alias Claude Rich dans Le Caporal épinglé)


Jean-François Rauger est directeur de la programmation à la Cinémathèque française.