Le Dieu noir et le diable blond

Le Dieu noir et le diable blond Deus e o diablo na terra do sol

Glauber Rocha
Brésil / 1964 / 123 min

Avec Geraldo del Rey, Yoná Magalhães, Maurício do Valle, Othon Bastos.

Un couple de paysans brésiliens, touché par la misère, est prêt à se compromettre pour s'en sortir. Ils s'en remettent à deux personnages violents et mystiques, symbolisant la révolte : une incarnation de Dieu et l'autre du diable.

Le sertão, immense territoire aride du Nordeste brésilien, est le théâtre choisi par Glauber Rocha pour son deuxième long métrage, tout à la fois western, chanson de geste, Kammerspiel de plein air, carnaval halluciné avec lequel le jeune critique et cinéaste bahianais entreprend de révolutionner la vision que son pays démesuré a de lui-même. Le lieu n'est pas pris au hasard. Pour Rocha, la faim, l'injustice et la violence qui règnent sur le sertão de 1940 sont toujours la seule vérité qui vaille d'être criée au Brésil de 1960. Le bouvier Manuel et sa femme Rosa sont en fuite après avoir perdu le presque rien auquel ils s'accrochaient. Dans sa débâcle, Manuel reste mû par un besoin d'espoir apparemment indéracinable. Il se jette aux pieds du mystique Sebastião, le dieu noir du titre, un prêcheur vivant perché avec ses fidèles sur un mont d'où il guette jusqu'au délire une terre promise et un grand renversement – sertão devenant mer, mer devenant sertão. Plus loin, Manuel se jette pareillement aux pieds du chef de bande Corisco, le dernier cangaceiro, diable blond possédé par le souvenir de l'épopée vengeresse de Lampião contre les propriétaires tout-puissants. Mais voyez : une blancheur calcinante ronge à même l'écran ciels et paysages pour faire savoir que, sous ce soleil, tout ce qui se pare de dualité – dieu, diable, mer, sertão – est un leurre, que tout recommencera dans la violence. Une ombrageuse figure tire son épingle dialectique du jeu : Antônio das Mortes, le tueur à gages, que Rocha fera revenir cinq ans plus tard. En 1964, Le Dieu noir et le Diable blond frappe comme un coup de tonnerre. L'âge de l'auteur ? 24 ans.

Nicolas Le Thierry d'Ennequin

Restauration 4K conduite par Metrópoles, Lino Meireles et Paloma Cinematográfica à partir du négatif 35 mm original conservé à la Cinemateca brasileira. Travaux réalisés par Estúdio Colors et Estúdio JLS, les cinéastes Luís Abramo et Rogério Moraes, sous la direction de Rodrigo Mercês. Ressortie en salles au troisième trimestre 2023 par Capricci.


Générique

Réalisateur : Glauber Rocha
Assistants réalisateurs : Paulo Gil Soares, Walter Lima Jr.
Scénaristes : Glauber Rocha, Walter Lima Jr.
Dialoguistes : Glauber Rocha, Paulo Gil Soares
Société de production : Copacabana Filmes (Rio de Janeiro)
Producteurs associés : Glauber Rocha, Jarbas Barbosa
Directeur de production : Agnaldo Azevedo
Distributeur d'origine : Les Cinémas Associés
Directeur de la photographie : Waldemar Lima
Ingénieurs du son : Agnaldo Azevedo, Geraldo José
Mixeur : Aloisio Viana
Compositeur de la musique originale : Sérgio Ricardo
Compositeur de la musique préexistante : Heitor Villa-Lobos "Deuxième et Cinquième Bacchianas"
Auteur des chansons originales : Glauber Rocha
Décorateur : Paulo Gil Soares
Costumier : Paulo Gil Soares
Monteur : Rafael Valverde
Script : Walter Lima Jr.
Créateur du générique : Lygia Pape
Interprètes : Geraldo delRey (Manuel), Yoná Magalhães (Rosa), Maurício doValle (Antonio das Mortes), Othon Bastos (Corisco), Lidio Silva (Sebastiao), Sonia dosHumildes (Dada), Marrom (l'aveugle), João Gama (le prêtre), Antonio Pinto (le "coronel"), Milton Rosa (le "coronel" Moraes)