Jean Epstein

Sa tête

Jean Epstein
France / 1929 / 36:14 / Silencieux
Avec René Ferté, France Dhélia, Nino Costantini, Irma Perrot.

Jean Bernard, dessinateur industriel, est fils unique et a perdu son père. Il est amoureux de Blanche Dumas, secrétaire d'un directeur de banque. Un jour, il rend visite à sa mère qui vit dans le petit village de Livilliers et y passe la nuit. Le lendemain matin, des policiers arrivent pour l'arrêter. Sa mère ne comprend pas de quoi il est accusé et va découvrir qu'il aurait assassiné le banquier qui faisait des avances à Blanche.

Film sauvegardé en 1991 d'après un matériel de conservation (contretype) réalisé en 1967. Malheureusement, le matériel d'origine (copie d'exploitation nitrate) ne fait plus partie des collections de la Cinémathèque française.


« Ce film est un simple fait-divers dépourvu de tout accessoire dramatique et intrigue policière traditionnelle. » (note de l'éditeur)

« Mon film est terminé depuis le 24 août et passera en exclusivité au Studio 28 vers novembre prochain. J'ai tourné à Livilliers de petits paysages qui m'ont paru (dans leur réalité, j'entends) très grands. Actuellement je continue à préparer deux films maritimes avec Paul Chack, en particulier un drame sur les bancs de Terre-Neuve. Mais le bouleversement de l'industrie cinématographique est tel que ces projets subissent de continuelles modifications. Sa tête est un film muet. Mais il peut être sonore comme n'importe quel film, même vieux d'avant la guerre ; il suffit d'un phono-amplificateur spécial dont il existe vingt-cinq modèles différents dans le commerce, tous imparfaits encore et bien inférieurs à la Voix de son maître, petit modèle portatif. Je ne suis pas du tout adversaire du film parlant, ni sonore. Je suis seulement étonné qu'on appelle « film parlant » de petites chansons filmées dans le genre de celles que réalisait Lordier avant la guerre, et qu'on appelle « film sonore » un film bien muet projeté avec accompagnement de haut-parleur. Pour le moment tout cela est du bluff. Mais il est évident que le jour où le film véritablement parlant et sonore, en couleur, en relief, aura été mis au point et recréera la réalité, aucun autre spectacle ne pourra lui faire concurrence. » (Jean Epstein, revue Pour vous, 17 octobre 1929)

Sa tête, parfois renommé La Tête, est le dernier court métrage muet réalisé par Jean Epstein, dernier film de sa période des films-essais, avant le passage au Synchronista et au grand large des films bretons (Mor'vran, 1929-1930). L'histoire est celle d'une fausse accusation et d'une rumeur accablante. Élégante et distante, France Dhélia interprète Blanche, le premier rôle féminin. Actrice fétiche de Gaston Roudès, producteur du film, mais également inoubliable sultane Daoulah dans La Sultane de l'amour de Le Somptier (la scène de Sa tête chez le fakir est peut-être un clin d'œil ? C'est en tout cas une raison de voir le film), Nène chez Baroncelli, ou encore au casting de Six et demi onze d'Epstein, France Dhélia joue aussi en 1929 dans Maternité de Jean Benoît-Lévy (où Marie Epstein apparaît assistante réalisatrice au générique). La réalisation et l'intrigue de Sa tête sont très classiques et ressemblent à une œuvre de commande, impersonnelle. Un film d'Epstein sans Epstein, en quelque sorte. Surtout si l'on pense aux chefs-d'œuvre du court métrage sortis en France en 1929 : Paris cinéma (Jean Mitry, Pierre Chenal), Nogent, eldorado du dimanche (Marcel Carné), Les Mystères du château de Dé (Man Ray), La Marche des machines (Eugène Deslaw), Les Oursins (Jean Painlevé) et surtout À propos de Nice (Jean Vigo).

Émilie Cauquy

Plus de détails sur « Sa tête » sur le Catalogue des restaurations et tirages de la Cinémathèque française