Catalogue des appareils cinématographiques de la Cinémathèque française et du CNC

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Caméra réversible film 35 mm

N° Inventaire : CNC-AP-99-888

Collection : Centre national du cinéma et de l'image animée

Catégorie d'appareil : Prise de vues cinématographiques

Nom du modèle : Kinétographe de Bedts pour Amateurs

Numéro de fabrication : n° 1 (au crayon sur le boîtier)

Lieu de fabrication : Paris, France

Année de fabrication : 1896

Brevet : George William de Bedts, B.F. n° 260 841, déposé le 29 octobre 1896, "Système d'appareil chronophotographique et de projectio... +

Fiche détaillée

Type de l'appareil

entraînement du film 35 mm par disque à deux dents diamétralement opposées, donnant un mouvement intermittent à un débiteur denté ; obturateur à boisseau ; deux axes pour deux chargeurs débiteur et récepteur à 10 m. de film ; lentille grossissante disposée à l'arrière de l'appareil pour visionner le film positif ; manivelle ; poignée

Auteurs

George William de Bedts
Paris, 368 rue Saint-Honoré

Fabricants

George William de Bedts
Paris, 368 rue Saint-Honoré

Utilisateurs

George William de Bedts
Paris, 368 rue Saint-Honoré

Distributeurs

George William de Bedts, The Anglo American Photo Import Office
Paris, 368 rue Saint-Honoré

Sujet du modèle

Informations non disponibles

Objectif

Darlot, Paris, F. 7.5, 3 cm (projection)

Taille de l'objet

Ouvert :
Informations non disponibles

Fermé :
Longueur : 20 cm
Largeur : 17 cm
Hauteur : 22 cm

Diamètre :
Informations non disponibles

Taille de la boîte de transport

Informations non disponibles

Remarques

"Projections mouvementées. Etrennes 1897. Kinétographe de Bedts pour Amateurs. Système d'appareil chronophotographique pouvant être appliqué comme appareil photographique et comme appareil pour la projection des images à des distances variables et comme kinétoscope de salon. La projection rendue possible au moyen du bec Auer (gaz incandescent). Pas besoin de pellicules de grandes largeurs. L'appareil permet d'obtenir des épreuves négatives [...]. Cet appareil peut projeter des images à courte distance [...]. Notre Kinétographe de Bedts pour Amateurs peut encore être employé comme Kinétoscope, en regardant l'image à travers le verre grossissant ou lentille à l'arrière de l'appareil : il suffit dans ce cas de se placer devant une source de lumière quelconque, telle que par exemple une lampe à pétrole éclairant l'image à travers l'objectif [...]. Prix : 250 francs. Tirez vos négatifs et vos positifs sur Films-Blair" (La Nature, n° 1228, 12 décembre 1896, publicité).

"Cercle d'Etudes photographiques et scientifiques d'Anvers. Réunions de mars 1897. Le "Kinétographe" pour Amateurs fait ensuite le sujet d'une nouvelle démonstration et la Projection mouvementée au moyen d'un bec incandescent, émerveille les auditeurs. Ce système d'appareil chronophotographique peut être employé comme appareil photographique et comme appareil pour la projection des images à des distances variables et est nommé "Kinétoscope d'amateur". D'après les explications fournies par M. Brinkman, l'appareil permet d'obtenir des épreuves négatives en faisant dérouler la bande, soit de haut en bas, soit de bas en haut, mais de préférence de haut en bas pour cette opération. Cet appareil peut projeter des images à courte distance avec un objectif à court foyer, en faisant passer la bande dans la gaine avant placée du côté de l'objectif, ou bien projeter à plus longue distance en utilisant la gaine arrière avec une plus grande facilité d'éclairage de l'image. Le "Kinétographe de Bedts pour Amateurs" peut encore être employé comme Kinétoscope en regardant l'image à travers le verre grossissant ou lentille : il suffit, dans ce cas, de se placer devant une source de lumière quelconque telle que, par exemple, une lampe à pétrole éclairant l'image à travers l'objectif ou même sans objectif. Enfin la faculté de pouvoir utiliser la bande de bas en haut ou de haut en bas, à l'avant ou à l'arrière de l'appareil, c'est à dire de quatre manières différentes, présente l'avantage de ne pas obliger à un déroulement préalable de la bande pour reprendre l'extrémité qui se trouve placé au centre du rouleau par suite de l'opération précédente. Le changement est des plus simples" (Hélios illustré, Bruxelles, vol. VII, 15 mars 1897, p. 732-734).

"L'appareil permet d'obtenir des épreuves négatives en faisant dérouler la bande, soit de haut en bas, soit de bas en haut, mais de préférence de haut en bas pour cette opération. Cet appareil peut projeter des images à courte distance avec un objectif à court foyer, en faisant passer la bande dans la gaine d'avant placée du côté de l'objectif, ou bien projeter à plus longue distance en utilisant la gaine d'arrière avec une plus grande facilité d'éclairage de l'image. Notre Kinétographe de Bedts pour Amateurs peut encore être employé comme Kinétoscope en regardant l'image à travers le verre grossissant ou lentille : il suffit, dans ce cas, de se placer devant une source de lumière quelconque, telle que par exemple une lampe à pétrole éclairant l'image à travers l'objectif ou même sans objectif. Enfin la faculté de pouvoir utiliser la bande de bas en haut ou de haut en bas, à l'avant ou à l'arrière de l'appareil, c'est à dire de quatre manières différentes, présente l'avantage de ne pas obliger à un déroulement préalable de la bande pour reprendre l'extrémité qui se trouve placée au centre du rouleau par suite de l'opération précédente. [...] Prix de l'appareil : 250 francs. Poids : 1600 grammes. Accessoires : bandes de 12 mètres papier Wellington sensible pour prises des négatifs, perforé larg. 35 mm : 5 fr. Bandes film (pellicule) sensibles mates ou transparentes, 10 m. x 35 mm perforées : 12,50 fr. Bandes positives imprimées pour projection 12 m. : 23 fr. Bandes positives imprimées pour projection de 18 à 21 m., 45 fr. Lanterne avec condensateur pour éclairage au Bec Auer, au gaz ou pétrole (projection de salon), 100 fr. [...]. Nous nous chargeons du tirage des négatifs et de leur développement, au taux de 6 fr pour une bande de 12 mètres. Nota bene. Tous nos films sont rigoureusement vérifiés et essayés dans des appareils de précision au pas d'Edison ; chaque film porte un numéro différent qui se trouve imprimé au commencement de la bande. Aucune réclamation ne sera acceptée en cas de retour de films sans que ce numéro soit intact et en entier sur la bande. Nous avertissons nos clients que les films dont nous donnons la liste dans notre cirulaire, sont notre propriété exclusive et qu'ils ne peuvent être reproduits, sans notre assentiment, sous peine de commettre le délit de contrefaçon. Par exception à l'article 4 de la loi de 1881 (29 juillet), les Films étant, par leur valeur et leur petit nombre d'exemplaires, assimilés aux estampes et gravures, ne sont pas astreints à la formalité du dépôt. Il ne faudrait donc pas conclure de cette absence de dépôt que le reproduction de nos Films est licite" (Publicité Le "Kinétographe de Bedts" pour Amateurs, Roanne, s.d., archives Barnes).

George William de Bedts est un pionnier belge (né à Gand le 30 juillet 1857 ; il décède vers 1905) du cinéma qui a tenu un rôle de première importance dans le domaine des photographies animées et dans la vulgarisation de la chronophotographie. D'abord simple vendeur, il va devenir ensuite fabricant de ses propres appareils. Il correspond avec la firme Eastman, évoquant en 1891 la possibilité de diriger une succursale à Paris. Finalement il ouvre une boutique à Paris, en 1893, au numéro 368 de la rue Saint-Honoré. Baptisé "Anglo-American Photo-Import Office", ce magasin est le dépôt général en France des pellicules et appareils photographiques fabriqués par l'European Blair Camera Company. Cette société, fondée en 1893, et dont le siège social se trouve à Londres, 9 Southampton Street, High Hilborn, était la succursale européenne de la Blair Camera Company, créée en 1881 aux Etats-Unis par Thomas Henry Blair. Cette firme américaine tient une grande place, comme celle de George Eastman, dans l'histoire : en effet, les premiers films du Kinétoscope Edison, montrés aux Etats-Unis à partir d'avril 1894, étaient tirés sur une pellicule 35 mm fabriquée par la Blair Camera Company. En Angleterre, Robert William Paul et Birt Acres réalisent leurs premiers films en 1895 grâce au matériel de l'European Blair Camera Company. Devenir le représentant, pour la France, des pellicules fabriquées par cette société, est déjà un avantage considérable pour de Bedts. En 1894 et 1895, il propose dans sa boutique de la rue Saint-Honoré toutes sortes d'appareils photographiques anglais et américains, du papier sensible au bromure, mais surtout des "nouvelles pellicules (films) en rouleaux à émulsion rapide". Ces films, enfermés dans un étui opaque qui les protège contre la lumière, sont transparents comme le verre, affirme la publicité. De Bedts vante aussi les mérites d'un appareil photographique à rouleaux de pellicule, le "Bull's Eye", qui sera présenté à Paris le 17 janvier 1895 à la Société d'études photographiques de Paris et vendu également par le Comptoir général de photographie quelques mois plus tard.
L'approvisionnement en pellicules a toujours été un problème majeur pour les chronophotographistes européens des années 1890. On lit, dans la correspondance d'Etienne-Jules Marey et de son préparateur Georges Demenÿ, les difficultés rencontrées pour trouver un bon support. Ils ont essayé la pellicule Eastman, Balagny, Jougla, et sans doute celle de Blair. Après sa rupture avec Marey, Demenÿ est venu en 1894 rendre visite à de Bedts pour examiner la nouvelle pellicule. L'exploitation industrielle des "portraits animés" et des "projections mouvementées" est une idée qui intéresse Demenÿ et de Bedts ; à la fin de l'année 1894, les deux hommes s'entendent et de Bedts prend en dépôt dans son magasin le phonoscope et la chronophotographe à came battante Demenÿ. C'est Henri de Parville qui le laisse entendre, en donnant l'adresse de de Bedts pour se procurer les appareils de Demenÿ. Il existe d'ailleurs un projet de contrat entre les deux pionniers, mais il est daté de l'année suivante, du 15 juillet 1895. Demenÿ concède alors à de Bedts le dépôt général, pour deux ans et la France, du chronophotographe pour amateurs, du phonoscope de salon, des disques zootropiques. Mais finalement, ce projet de contrat ne sera jamais signé et Demenÿ finalement s'engagera avec Léon Gaumont. Et c'est de Bedts qui fournira la pellicule 60 mm à Gaumont et Demenÿ pour leurs premiers essais. Dans une lettre du 7 septembre 1895, Gaumont écrit à Georges Demenÿ : "Pour nous donner satisfaction, Monsieur Debetz [sic] a bien voulu faire couper en deux des bobines de 12 cm, ce qui me procure le plaisir de vous adresser [...] 15 bobines de 60 mm de largeur". Gaumont ajoute : "M. Debetz m'a appris qu'il venait d'obtenir la concession pour la France d'appareils genre Edison, il m'a montré de petites vues en bande de 10 m de long que j'ai trouvé très réussies" (ce sont donc des films du Kinétoscope Edison). A la fin 1895, de Bedts est également sollicité par Henri Joly, qui vient de rompre avec Charles Pathé. Mais de Bedts décide de se lancer seul dans la course à la projection. Louis Lumière s'en inquiète le 2 novembre 1895 : "On nous talonne de tous côtés [...]. De Bedts continue à faire le plus de bruit possible avec ses chronos et il serait vraiment regrettable qu'il montrât quelque chose avant nous". Réponse du constructeur du Cinématographe, Jules Carpentier, le 4 novembre 1895 : "Je sais que M. de Bedts se remue beaucoup : son appareil d'essai existe ; il a fait des bandes et les a projetées. Leurs dimensions sont rigoureusement celles du Kinetoscope d'Edison. Mais il n'est pas encore prêt, je crois, de livrer des appareils. De notre côté nous ne perdons pas une minute".
De Bedts ne fera pas les premières projections publiques et payantes, mais il sera le premier à proposer en vente libre du caméra réversible, le "Kinétographe" (CNC AP-19-1350) qui évoque le nom de la caméra d'Edison, et aussi le futur projecteur de Méliès. Il dépose d'abord le 10 janvier 1896 son premier brevet d'invention pour une "poinçonneuse destinée au perforage des films ou pellicules utilisées pour la photographie et la reproduction des images mouvementées". Il est le premier breveté en 1896 en matière de cinématographie. Le 14 janvier 1896, il dépose un brevet pour sa caméra réversible, "un système de mécanisme à mouvement intermittent applicable aux appareils chronophotographiques et aux appareils pour projections animées". Le mouvement de la pellicule est obtenu au moyen de deux disques dentés disposés l'un au-dessus de l'autre verticalement. Celui du haut, plus petit, ne porte que trois dents sur la circonférence, divisée en trois parties égales. Ces trois dents pénètrent une à une, au fur et à mesure de la rotation, dans chacun des dix groupes de dents disposés sur la circonférence du deuxième disque, d'un diamètre plus grand. Ce grand disque (6 cm de diamètre) est donc entraîné de façon intermittente ; il est relié sur le même axe à un débiteur denté qui va entraîner le film, et à l'obturateur. La caméra peut servir aussi de projecteur (il est ici en version projection). De Bedts, comme pour le Kinétographe d'amateur, suggère d'utiliser son appareil comme un Kinétoscope :"En plaçant l'instrument en face d'un endroit bien éclairé, par exemple une fenêtre ou une lampe, et en regardant au travers de l'objectif, le résultat est alors le même que celui obtenu avec un Kinétoscope ordinaire".
Les mérites de l'appareil sont vantés jusqu'en 1899 dans les ouvrages techniques français, ceux de Breton et Trutat par exemple. A Londres, la revue The Photographic Dealer consacre un article à de Bedts, en août 1897. Il y est dit notamment que l'on trouve au 368 rue Saint-Honoré, "un grand nombre de films aux sujets variés". Pour le marché anglais, de Bedts a d'ailleurs déposé un brevet décrivant sa caméra ; il possède aussi une boutique à Londres, 65 Chancery Lane. Parmi les premiers utilisateurs du Kinétographe de Bedts, on peut citer les frères Emile et Vincent Isola, magiciens, qui ont ouvert un "théâtre Isola", 39 bd des Capucines à Paris : "Depuis tantôt trois mois, c'est à qui ira voir les tableaux animés du cinématographe... [...] Aussi bien la concurrence va venir et déjà on voit un autre système, le système de Bedtz, fonctionner en face chez les frères Isola" (Henri de Parville, Annales politiques et littéraires, 26 avril 1896). Après avoir utilisé le Kinétographe de Bedts, les Isola emploieront un autre projecteur, le "Kinétograph" de Louis Charles que Méliès utilisera aussi au théâtre Robert-Houdin et dont il s'attribuera l'invention (voir AP-95-1451).
Dans un catalogue édité par de Bedts en 1897, il est indiqué que l'Anglo-American Photo-Import Office possède une collection de 310 sujets mesurant entre 18 et 22 m. sur film Edison. De Bedts revendique la complète réalisation des films qui figurent à ce catalogue (bien que certains semblent provenir d'Edison...) : "Toutes nos bandes sont faites par nous et avec le Kinétographe de Bedts". On sait qu'il a travaillé avec un assistant, Arthur Roussel, interviewé par le Moving Picture World, le 11 avril 1914 : "Mr. de Bedts was one of the pioneer producers and manufacturers... The methods were very crude and the production was not very large..."
En décembre 1896, de Bedts lance aussi son Kinétographe pour amateur (CNC AP-99-888). Par ailleurs, on peut aussi attribuer à de Bedts le titre de premier fondateur d'une société française destinée à exploiter la photographie animée. En effet, le 15 janvier 1896, il crée la société en commandite "G. de Bedts et Cie", dont le siège est situé 368 rue Saint-Honoré, et qui a pour objet "l'exploitation et la vente des différents appareils servant à la préparation des bandes ou films destinés à la reproduction des images mouvementées". Il s'agit d'exploiter les deux brevets, celui de la perforeuse et du Kinétographe, et d'exploiter les concessions accordées à de Bedts par la firme Blair Camera Company de Boston - New York - Chicago, et l'European Blair Camera Company de Londres. Il a trouvé deux commanditaires : André Castelini, publiciste à Paris, et Guillaume Sabatier, directeur du journal Le Quotidien illustré à Paris. Guillaume Sabatier veut notamment se servir du Kinétographe pour des publicités commerciales (projections sur la devanture de son journal), mais on ne sait si ces projections ont eu lieu. Le capital social est peu élevé : 10 000 francs - très faible en comparaison des sociétés Gaumont ou Pathé. En outre, de Bedts doit subir plusieurs procés au cours de l'année 1896, dont un intenté par le pionnier Jean-Baptiste Darras. La chute est rapide : le 15 juillet 1898, la société est dissoute. En 1902, de Bedts est domicilié à Asnières, 6 rue du Progrès. Il ouvre une boutique de produits divers importés à Paris, 5 rue de Stockholm, puis il disparaît (L. Mannoni, "George William de Bedts et la commercialisation de la chronophotographie", in (collectif), Les Vingt premières années du cinéma français, actes du colloque international de la Sorbonne nouvelle, Paris, PSN/AFRHC, 1995, p. 39-51).



Bibliographie

La Nature, n° 1228, 12 décembre 1896 (publicité).

Hélios illustré, Bruxelles, vol. VII, 15 mars 1897, p. 732-734.

Le "Kinétographe de Bedts" pour Amateurs, Roanne, s.d., archives Barnes.

L. Mannoni, "George William de Bedts et la commercialisation de la chronophotographie", in (collectif), Les Vingt premières années du cinéma français, actes du colloque international de la Sorbonne nouvelle, Paris, PSN/AFRHC, 1995, p. 39-51.