Catalogue des appareils cinématographiques de la Cinémathèque française et du CNC

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Appareil enregistreur de la circulation du sang (battement du pouls)

N° Inventaire : CNC-AP-99-889(1/2)

Collection : Centre national du cinéma et de l'image animée

Catégorie d'appareil : Méthode graphique

Nom du modèle : Sphygmographe direct

Numéro de fabrication : n° 47 794

Lieu de fabrication : Paris, France

Année de fabrication : 1869

Brevet : Etienne-Jules Marey, brevet français n° 47 980, 31 décembre 1860, "appareil dit : Sphygmographe, propre à observer et inscrir... +

Fiche détaillée

Type de l'appareil

cadre en laiton se fixant sur l'avant bras à l'aide d'un ruban en tissu noir ; plaque d'ivoire montée sur lame flexible métallique ; style monté sur levier métallique ; moteur à ressort et à roue crantée faisant avancer une plaque métallique supportée par un chariot à crémaillère ; écrin en cuir

Auteurs

Marey Etienne-Jules
Boulogne sur Seine, Parc des Princes, Station physiologique

Fabricants

Breguet
Paris, 39 quai de l'Horloge

Utilisateurs

Marey Etienne-Jules
Boulogne sur Seine, Parc des Princes, Station physiologique

Distributeurs

Breguet
Paris, 39 quai de l'Horloge

Sujet du modèle

Informations non disponibles

Objectif

Informations non disponibles

Taille de l'objet

Ouvert :
Informations non disponibles

Fermé :
Longueur : 19 cm
Largeur : 5 cm
Hauteur : 3.5 cm

Diamètre :
Informations non disponibles

Taille de la boîte de transport

Longueur : 21 cm
Largeur : 6.5 cm
Hauteur : 5 cm

Remarques

Marque sur la boîte : "Sphygmographe de Marey". Marque sur l'appareil : "Breguet" ; "Breveté S.G.D.G." ; "47 794".

"Le dicrostisme du pouls, dont le physiologiste allemand Karl Vierordt nie l'existence chez les sujets sains, est durant la deuxième moitié du XIXe siècle un thème très débattu par les médecins. Le professeur Simon Beau soutient que dans le pouls dicrote, la première pulsation est imprimée par le coeur ; la seconde serait provoquée par le retrait élastique de l'aorte. Son élève Marey, non sans emportement, juge en octobre 1858 cette théorie "inadmissible" : "l'aorte resterait-elle un instant distendue et au repos avant de revenir sur elle-même ? [...] Cet arrêt n'a pas de raison d'être". En 1859, tout en terminant sa thèse qui sera soutenue en mars, Marey cherche un système capable de retranscrire sur papier le mouvement exact et complet de la double pulsation. Il connaît au moins depuis 1857 le livre de Karl Vierordt, Die Lehre von Arterienpuls (1855), où est décrit le premier sphygmographe. Marey cite cet ouvrage dans sa première étude de 1857. Il a tout de suite été frappé, semble-t-il, par la complexité et la lourdeur du sphygmographe allemand. Il a surtout été surpris par les graphes publiés par Vierordt, où l'amplification et la descente semblent isochrones, où le dicrotisme du pouls n'apparaît pas, sauf si l'on charge excessivement la cupule de l'appareil. Vierordt en a conclu que le "pseudo dicrotus" n'existe pas chez le sujet sain, mais uniquement dans les cas pathologiques. [...] Marey attaque ainsi son confrère allemand : "Son instrument, tel qu'il l'a construit, ne lui permettait pas de constater l'inégalité des deux moitiés de la pulsation ; en effet, les poids dont il charge son levier pour déprimer le vaisseau, les articulations multiples de son espèce de parallélogramme de Watt, rendent son instrument lent à mouvoir par suite de sa masse trop considérable, et quoiqu'il ait aperçu avec des moyens micrométriques une légère inégalité entre les deux périodes, il est resté bien au-dessous de la vérité". La masse à mouvoir, par son inertie, déforme le mouvement. Marey annonce alors qu'il a "modifié le sphygmographe de M. Vierordt d'une manière qui supprime les principales causes d'erreur de cet excellent instrument". Marey termine sa communication d'avril 1859 à la Société de biologie en annonçant qu'il présentera plus tard sa propre version du sphygmographe revue et corrigée par ses soins. Quelques mois après, toujours en 1859, Marey donne à la même Société une communication intitulée "Recherches sur le pouls au moyen d'un nouvel appareil enregistreur, le sphygmographe". Il a en main sa propre version de l'appareil. C'est une grande réussite. Cet appareil est, selon Marey, "un microscope du mouvement ; ce n'est pas tout : cet instrument laisse une trace écrite de ses indications et perpétue ainsi un phénomène fugitif dont le souvenir serait bien vite effacé sans cela". L'appareil a donc des pouvoirs d'exploration de phénomènes invisibles à l'oeil nu qu'il amplifie, mais aussi des capacités de mémorisations. Pour la première fois de sa vie, Marey dépose le 31 décembre 1860 un brevet d'invention de quinze ans pour un "appareil dit : Sphygmographe, propre à observer et inscrire les pulsations du coeur". Le brevet est au nom de Marey mais a été déposé par un nommé Mathieu, fabricant d'appareils de chirurgie installé à Paris carrefour de l'Odéon, et qui serait le premier constructeur de l'appareil (Breguet étant le deuxième, suivi ensuite par Verdin). Marey explique dans ce brevet : "Pénétré des importants services que serait appelé à rendre à la science thérapeutique et médicale un instrument qui, reproduisant par des lignes ou signes exacts et matériels les battements du pouls, permettrait d'étudier intimement et rigoureusement les mouvements du coeur jusque dans leurs détails ou leurs irrégularités les plus minutieuses, j'ai imaginé et exécuté un appareil mécanique auquel je donne le nom de sphygmographe qui remplit ce but avec succès et d'une manière complètement satisfaisante. Mon invention, remarquable de simplicité, consiste en une lame de ressort en contact immédiat avec le bras et qui transmet les pulsations par l'intermédiaire d'une vis de réglage à une plume chargée de les enregistrer sur un papier animé d'un mouvement rectiligne et devant laquelle il présente successivement tous les points de sa longueur". Cette lame de ressort, légèrement courbée, porte à son extrémité un petit talon en corne ou en ivoire, dont la face méplate repose et appuie directement sur la partie du bras où le pouls est pris. Au bout opposé, cette lame est fixée à l'intérieur d'un châssis qui le forme le bâti de l'appareil et au-dessus duquel est ménagé un certain jour, pour permettre d'augmenter ou de diminuer au moyen d'une vis la pression du talon sur la veine. La lame de ressort porte également une pièce rectangulaire sur les côtés de laquelle sont disposés les tourillons du point d'oscillation d'un levier libre, recourbé à l'autre extrémité en forme d'épaulement pour venir, lorsque le mécanisme est en fonction, butter contre le porte-plume et ainsi transmettre à la plume les mouvements ou pulsations du pouls. Contre cet épaulement, le levier est traversé par une vis à l'aide de laquelle on peut régler la position plus ou moins élevée de la plume sur le papier. Le mécanisme moteur (à ressort) se remonte par un bouton dont l'axe porte un disque à rochet arrêté au moyen d'un cliquet ; un levier armé d'un goujon est chargé de délivrer ou de suspendre le mouvement d'horlogerie. Marey indique que la plaque qui porte le papier peut être faite en métal léger ou en aluminium. Le porte-plume oscillant peu être construit en bois mince et la plume en acier. Le papier utilisé est blanc et glacé (alors la plume devient un bec métallique humecté d'encre) ou bien noirci à la fumée (la plume doit alors être très fine). L'instrument une fois réglé est assujetti sur le bras du sujet par deux palettes métalliques qui en épousent la forme. Les palettes sont articulées et sont serrées autour du bras à l'aide d'un lacet. Lorsque le petit talon en corne a été disposé sur l'artère de l'avant-bras, que la plume, agitée par le pouls, a été amenée par la vis, il ne reste plus qu'à délivrer le mouvement d'horlogerie ; le chariot se met en marche et lorsqu'il est en fin de course, on trouve sur le papier que la plume y a inscrit une suite continue de courbes, dont les angles sont plus ou moins vifs et plus ou moins espacés, retraçant ainsi "l'état du coeur avec une exactitude toute mathématique". Marey s'apercevra très vite de quelques défauts mineurs de son sphygmographe, notamment dans son moteur à ressort dont la régularité laissait à désirer et dans le système de transmission du mouvement au levier inscripteur. C'est le grand spécialiste parisien de l'horlogerie, Louis-François Breguet, le principal fabricant de Marey, qui met au point la deuxième version du sphygmographe en 1869. Le sphygmographe ne pèse que 240 grammes et est livré dans un écrin gaîné de cuir noir, dont le couvercle porte la mention en lettres d'or : "Sphygmographe de Marey". L'exemplaire présenté ici, fabriqué par Breguet, est complet avec ses fines lamelles de papier glacé, rangées dans un emplacement qui double l'intérieur de l'écrin. Breguet a tellement travaillé sur l'appareil de Marey et ses modifications sont si profondes que le physiologiste l'autorise à déposer à son tour un brevet d'invention, le 30 septembre 1869, "pour des perfectionnements apportés à l'appareil dit sphygmographe". Seul le nom de Breguet figure comme auteur sur l'intitulé de ce brevet, cependant le nom de Marey est cité dans le cours du texte. Breguet en profite pour revendiquer l'application de la vis sans fin s'engrenant dans une poulie dentée, ce qui paraît un peu étonnant : "Le but de la présente demande est de m'assurer la propriété exclusive des perfectionnements que j'ai apportés à l'appareil dut Sphygmographe qui permet d'observer et d'enregistrer les pulsation du coeur ; ces perfectionnements sont caractérisés : 1° par la manière dont la vis de réglage attaque l'axe du levier écrivant, 2° par la façon dont cette vis est reliée au ressort qui appuie sur l'artère. [...] J'entends me réserver l'application de la vis sans fin engrenant dans une poulie dentée, à tous les appareils enregistreurs et notamment à ceux employés par les physiologistes". Pour établir une solidarité parfaite entre le ressort de pression qui appuie sur le vaisseau et le levier qui en inscrit les mouvements, le ressort porte en effet, au dessus de la plaque, une longue vis terminée par un bouton de cuivre. La vis, poussée par une pression élastique du côté du levier, s'engrène à la façon d'une crémaillère dans la gorge moletée d'un galet situé sur cet axe. Charles Verdin, lui aussi constructeur pour Marey, se chargera également de la fabrication et la vente du sphygmographe deuxième version. Le sphygmographe deviendra l'un des instruments vedette de Verdin, il figure même en couverture de son Catalogue des instruments de précision édité vers 1885. L'appareil est alors vendu 130 francs, avec 100 bandes de papier (1 franc). Comment se sert-on du sphygmographe ? Supposons que l'on étudie le pouls d'un malade. Il vaut mieux d'abord que le sujet soit couché et qu'aucun obstacle ne s'oppose à la souplesse de son bras. On étudie généralement le bras droit ; le sujet doit alors légèrement s'incliner de ce côté. "Le bras calleux d'un terrassier n'est en aucune façon comparable au bras mince et souple d'une jeune fille" (Paul Lorain). Le médecin doit d'abord chercher l'endroit idéal sur l'artère où l'on appuiera le petit talon en corne qui se trouve au bout du ressort de l'appareil. Il faut ensuite prendre de la main gauche le sphygmographe, en prenant soin de laisser relevé le levier, saisir le poignet du malade et fixer l'instrument sur l'avant-bras au moyen du lacet. Vient alors le réglage micrométrique des deux vis, l'une qui presse sur le ressort, l'autre qui abaisse ou élève le levier. La pression du ressort ne doit pas être trop élevée, ni trop faible. Deux types de papier sont utilisés, l'un blanc, glacé, l'autre noir enduit de fumée. Dans le premier cas c'est une plume enduite d'encre ; mais la plume a l'inconvénient d'être un peu lourde. Dans le deuxième cas, le levier est équipé d'une pointe fine qui grave son mouvement sur la surface du noir de fumée. Ce système fonctionne mieux que le précédent. Pour noircir le papier, il suffit de promener à sa surface la flamme d'une bougie. Pour conserver durablement les inscriptions réalisées sur la bandelette enduite de noir de fumée, on plonge celle-ci dans un liquide fixatif utilisé en photographie, qui joue le rôle d'un vernis. Plusieurs enregistrements sont nécessaires afin d'obtenir un bon tracé. "Il y a beaucoup de tracés qui sont bons, mais il n'y en a qu'un qui soit le bon" (Paul Lorain, hôpital Saint-Antoine). Si le chariot qui porte le papier effectue sa course pendant quinze secondes, il suffit de multiplier par 4 le nombre de pulsations obtenues pour connaître le chiffre de la fréquence du pouls pour une minute" (Laurent Mannoni, "Le sphygmographe : une invention en trois étapes", Sur les pas de Marey, Paris, L'Harmattan/Sémia, 2004, p. 11-81).



Bibliographie

E.-J. Marey, "Recherches sur le pouls au moyen d'un nouvel appareil enregistreur, le sphygmographe", Comptes rendus des séances et mémoires de la société de Biologie, 1859, p. 282-283.

E.-J. Marey, Physiologie médicale de la circulation du sang, basée sur l'étude graphique des mouvements du coeur et du pouls artériel, Paris, Adrien Delhaye, 1863.

E.-J. Marey, La méthode graphique dans les sciences expérimentales, Paris, G. Masson, s.d. [1878].

Paul Lorain, Etudes de médecine clinique faites avec l'aide de la méthode graphique et des appareils enregistreurs, Paris, J.-B. Baillière, 1870.

Diplôme d'honneur, Exposition internationale d'électricité, Paris, 1881. Maison Breguet fondée en 1783. Bureaux 39, quai de l'Horloge. Société anonyme Capital : 3.000.000. Ateliers rue Didot, 19. Paris. Extrait du Catalogue général illustré. Instruments de physiologie de M. J. Marey, Membre de l'Institut. Appareils pour l'électricité médicale, Paris, Imprimerie Gauthier-Villars, 55, quai des Grands-Augustins, 55, janvier 1884.

Laurent Mannoni, Etienne-Jules Marey, la mémoire de l'oeil, Paris-Milan, Mazzotta-Cinémathèque française, 1999, p. 84.

Laurent Mannoni, "Le sphygmographe : une invention en trois étapes", Sur les pas de Marey, Paris, L'Harmattan/Sémia, 2004, p. 11-81.