Mulholland Drive

Les films de David Lynch (né en 1946) touchent aux mystères du fonctionnement de la pensée humaine. Avec Mulholland Drive, le cinéaste souhaitait réaliser, comme avec Twin Peaks, une série télévisée. Est-ce l'ampleur du projet ou sa bizarrerie qui fit reculer la chaîne américaine ABC ? Ce sont finalement Pierre Edelman et StudioCanal qui produiront le film.

Betty (Naomi Watts), jeune comédienne, blonde, diaphane, émerveillée, débarque à Hollywood. Rita (Laura E. Harring), magnifique brune pulpeuse, sort amnésique d'un accident sur Mulholland Drive, la route bordant les maisons de stars. Les deux femmes se lient d'amitié et partent à la recherche de l'identité de Rita. Leurs seuls indices : le mot "silencio", une étrange clef bleue et un nom, "Diane Selwyn". La proximité des deux jeunes femmes s'intensifie. D'amies, elles deviennent amoureuses jusqu'à se confondre bientôt l'une l'autre : avec une perruque, la brune devient blonde. Qui est Betty, qui est Rita ? Apparaît alors une boîte qu'ouvre la clef mystérieuse. À cet instant, le film bascule. Betty n'est plus cette jeune première douce et attentionnée, mais Diane, actrice ratée, sortant d'un long sommeil au cours duquel elle a rêvé toute cette première partie du film. Rita n'est plus cette femme perdue, mais Camilla, star hollywoodienne, celle que Diane aurait voulu devenir.

Ce diptyque oscille entre dualité et duplicité. Tout y est à double facette : la réalité de la seconde partie et les images-miroirs du rêve. La brune Camilla-Rita est le fantasme de la blonde Betty-Diane, une rivale que son inconscient a transformée en amante.

Avec Mulholland Drive, Lynch réalise un film sur l'emprise envoûtante d'Hollywood, tout comme l'avaient fait avant lui Wilder (il cite Sunset Boulevard), Minnelli ou encore Donen et Kelly. Mais c'est surtout d'Hitchcock ou de Godard qu'il est le plus proche : l'enquête identitaire et la fascination pour une figure mortifère comme dans Vertigo ; la dualité de Brigitte Bardot (Camille), à la fois blonde et brune dans Le Mépris.