Jules et Jim

En 1961, François Truffaut (1932-1984) tourne son troisième long métrage : Jules et Jim, l'adaptation du roman éponyme d'un auteur inconnu, Henri-Pierre Roché (1879-1959). Envoûté par le style et le récit du livre, le jeune réalisateur signe un film lumineux, joyeux et grave, qui connaît un succès mondial.

Le film évoque l'amitié indéfectible entre deux artistes de la Belle Époque, Jules l'Allemand et Jim le Français, et le trio amoureux – à la liberté morale et sexuelle assumée – qu'ils forment avec Catherine. Moderne, cultivée, séduisante et sensuelle, Catherine épouse Jules. Après plusieurs années, elle le délaisse pour de brèves aventures avant de faire de Jim son amant. Avec l'accord de Jules, Catherine l'installe chez eux. Jim lui avoue alors aimer sa nuque, qu'il regardait jusque-là en secret. Catherine la lui dévoile pour qu'il l'embrasse.

Truffaut montre ainsi un élément de séduction primordial pour lui comme pour Roché : la chevelure féminine. Il filme la nuque de Catherine à plusieurs reprises, tout comme il filmera celle de Muriel dans Les Deux Anglaises et le continent (1971), autre roman de Roché qu'il adaptera quelques années plus tard. La réplique de Jim est d'ailleurs extraite de ce second roman autobiographique, où Claude Roc, alias Henri-Pierre Roché, surnomme la jeune femme "Nuk", fasciné par cette zone "blanche sous le chignon d'or massif" (1).

Cachée par la chevelure, comme le sexe par la toison pubienne, la nuque revêt une puissante fonction érotique. Le geste qui la dévoile cristallise le désir. Dans L'Heure du loup (1967) d'Ingmar Bergman, la femme qui pose pour son mari peintre soulève ses cheveux dorés, baignés de soleil. Confiante et complice, elle offre alors sa nuque au regard du peintre, mais aussi à celui plus voyeur du réalisateur et du spectateur qui la contemplent sans être vus.