La méthode Pimenoff : Le carnet 17

Parmi tous les décors de films réalisés par Serge Pimenoff, ceux pour Les Misérables de Jean-Paul Le Chanois (1957), constituent l'une de ses contributions les plus abouties et les plus complexes. Photo 1 Les presque quatre heures qui le composent donnent une place d'honneur aux décors et avant tout ceux de Paris, qui sont au centre du texte de Victor Hugo. Le film est donc un cas intéressant pour analyser la portée du regard « distancié » d'un immigré russe sur Paris dans l'adaptation d'un monument de la littérature française, mais aussi pour comprendre les méthodes de travail du décorateur.

Le carnet n°17 est entièrement consacré aux Misérables (plus de 200 pages d'annotations). Ce qui frappe d'emblée, c'est la minutie des recherches iconographiques en vue de la reconstitution en studio des quartiers mentionnés par Victor Hugo. Pour ce faire, Serge Pimenoff a effectué des recherches dignes d'un archéologue. Par ailleurs, l'analyse des documents présents dans les carnets d'une part, de la genèse du texte des Misérables à travers le manuscrit lui-même et des documents annexes conservés à la Bibliothèque nationale de France, au Musée Carnavalet, à la Maison Victor-Hugo d'autre part, met en évidence des similitudes dans la méthode employée par l'écrivain et le décorateur pour retrouver les traces et les indices du « Paris disparu ». Un Paris décrit, au final, avec des détails foisonnants par l'un comme par l'autre, malgré la transformation de la capitale par Haussmann et leurs visions respectives éloignées, dans le temps et dans l'espace. De même, on repère des parallélismes troublants entre la réception critique du texte et la réception critique du film.

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Affiche du film Les Misérables, de Jean-Paul Le Chanois (1957).
André Bertrand © ADAGP, Paris, 2011