Entretiens à Chaillot, 1986

Claude Chabrol à la Cinémathèque française

Auteurs divers
France / 1986 / 24:54
Avec Claude Chabrol, Jean Douchet.

Le 5 mars 1986, Claude Chabrol est reçu à Chaillot par Jean Douchet dans le cadre du cinquantenaire de la Cinémathèque française.

Montage réalisé à partir de rushes sur cassette Betacam retrouvés en 2023 et numérisés par la Cinémathèque française. Remerciements à François Manceaux et Michel David, au Fema La Rochelle (Sophie Mirouze et Sylvie Pras), à Cécile Maistre-Chabrol.

Costard gris, nœud pap de traviole mais assorti à la pochette, généreux, l'œil pétillant et encore quelques cheveux, Chabrol porte chic. À 56 ans, il affiche déjà plus de 35 films au compteur et après une période professionnelle complexe, il est revenu sur le devant de la scène grâce à un personnage jubilatoire et fanfaron, dont le deuxième opus, Inspecteur Lavardin (après Poulet au vinaigre, un an plus tôt), vient de sortir sur les écrans en ce printemps 1986. Ce flic trublion incarné par l'ébouriffant Jean Poiret, il faut bien dire qu'il lui ressemble à ravir.

Les questions du public fusent autour de son goût pour la critique de la bourgeoisie, pour les romans à énigmes, pour les productions modestes. Chabrol a la répartie alerte et donne l'impression, en bon joueur d'échecs, d'avoir toujours un coup d'avance.

« Mon truc, c'est l'octuor, c'est pas la grosse symphonie ! » L'humour n'est jamais loin, pour désamorcer sa timidité (eh oui !) et l'éventuel trop sérieux de l'exercice, même quand un sympathique et insolent jeune homme lui demande pourquoi il est si pressé de tourner, alors qu'il ferait sans doute de meilleurs films s'il tournait plus longtemps. « On peut tourner vite et bien », assure Chabrol précis et goguenard, avant de déduire que, sinon, David Lean (qui tournait des mois et des mois) serait le plus grand cinéaste du monde...

Humble, ambitieux et malin, il évoque ici son appétit pour « la vérité cachée qu'il faut aller découvrir, et puis quand elle est découverte, qu'est-ce qu'on en fait ? », pour les contradictions, pour « ces moments où ça coince, » pour l'œil-microscope et le bonheur divin que lui procurent les tournages.

Chabrol aimait aller gratter là où ça dérange, là où ça agace, préférant toujours le ridicule à la méchanceté. Il n'avait pas peur de grand-chose (sauf de la mort) et l'art de rire de tout et de trouver la malice et la lumière dans le chaos. Son acuité me manque follement. Je me demande souvent comment il raconterait notre invraisemblable monde d'aujourd'hui. Cette année, le Fema La Rochelle présente les pépites de la période dite « pompidolienne » qu'il a si admirablement dépeinte. Courez-y !

Cécile Maistre-Chabrol


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