Avant-gardes et incunables

Essais cinématographiques

Alfred Sandy
France / 1928 / 0:44 / Silencieux

Divertissement visuel et cinégraphique dans le pur style abstrait de l'avant-garde française des années 1920, « entre la vision de René Clair et de Germaine Dulac, transposition cinématographique des arguments surréalistes imaginés par Picabia et un scénario d'Artaud. » (Henri Langlois)

Visual and "cinegraphic" entertainment in the pure abstract style of the French avant-garde of the 1920s, "somewhere between the vision of René Clair and Germaine Dulac, a cinematographic transposition of the surrealist arguments imagined by Picabia and a script by Artaud." (Henri Langlois)

Copie d'exploitation acquise par la Cinémathèque française et contretypée en 1988, numérisation réalisée en 2012.


L'ensemble des trois films que l'on connaît – Lumière et ombre (1928), Prétexte (1928), et Essais cinématographiques (1928) – dure à peine plus de dix minutes, mais témoigne d'une originalité certaine dans le contexte de l'avant-garde française des années 1920. Les films, sous-titrés par Sandy « Divertissement visuel » ou « Essai cinégraphique », présentent le plus souvent des volumes abstraits (anneaux, cylindres, parallélépipèdes, spirales...) dans un mouvement tantôt tournoyant (vraisemblablement sur un plateau de gramophone), tantôt filmé en animation (empilement progressif des volumes). Les effets de lumière sont variés : lumière dure mettant en relief les formes nettes et contrastées des volumes et de leurs ombres, ou jeux de scintillements qui peuvent faire penser à certaines séquences de Cinq minutes de cinéma pur (Henri Chomette, 1925) ou d'Emak Bakia (Man Ray, 1926).

Patrick de Haas


Ces films ont été réalisés par Alfred Sandy, un cinéaste sur lequel il existe à ce jour peu de renseignements. Ils appartiennent au courant dit du « cinéma abstrait », illustré par Henri Chomette, Hans Richter ou Francis Bruguière. On sait que Lumière et ombre a été projeté au Studio 28 à partir du 4 juin 1928 et Essais cinématographiques du 7 juillet 1930 au 21 août 1930. Le Studio 28 avait participé à leur production. Les deux films méritent d'être comparés aux meilleures réussites de ce cinéma fondé sur l'hypnose et l'étude des métamorphoses lumineuses et des « cristallisations » (mouvements de cristaux et anamorphoses de figures géométriques). Ils évoquent irrésistiblement les motifs de Man Ray, qu'ils développent par bien des aspects. Dans les années cinquante, dans un texte inédit retrouvé dans ses cahiers, Henri Langlois intégra Sandy au sein de la tendance surréaliste du cinéma d'avant-garde français représentée par Entr'acte et La Coquille et le clergyman : « Ces deux films appartiennent à la vision de René Clair et de Germaine Dulac et ne sont que la transposition cinématographique des arguments surréalistes imaginés par Picabia et un scénario d'Artaud. Par là ils se rattachent à un mouvement surréaliste, surtout Entr'acte où René Clair invente dans l'esprit profondément dadaïste de Picabia. Ces deux films et un court métrage, Fait divers, inspiré à Claude Autant-Lara en 1922 par le théâtre d'avant-garde que dirigeait son père et sa mère et dont il décorait la mise en scène, et interprété par Artaud, qui jouait dans ce théâtre, sont les seules expressions directes de l'art d'avant-garde dans le cinéma français avec La Perle de Georges Hugnet et un film inconnu et mystérieux du nom de Prétexte qui est signé du pseudonyme de Sandy, car on ne peut appeler un film l'Anémic cinéma de Marcel Duchamp. » (Nous soulignons.)

Dominique Païni


Pour aller plus loin :

  • Jeune, dure et pure ! Une histoire du cinéma d'avant-garde et expérimental en France, sous la direction de Nicole Brenez et Christian Lebrat, Cinémathèque Française / Mazzota, 2001
  • Fiche du film dans le catalogue des collections films du Centre Pompidou : https://www.centrepompidou.fr/fr/ressources/oeuvre/czAgroq
Plus de détails sur « Essais cinématographiques » sur le Catalogue des restaurations et tirages de la Cinémathèque française