Le peintre britannique Dante Gabriel Rossetti (1828-1882) compte parmi les fondateurs du mouvement préraphaélite, qui, en 1848, prône un retour à l'étude de la nature. Il peint Bruna Brunelleschi en 1878, vers la fin de sa vie. C'est son amie Jane Morris, déjà peinte maintes fois, qui lui sert de modèle.
Avec son cou élancé, sa bouche charnue, ses traits masculins et son regard mélancolique, cette femme incarne à merveille l'idéal de beauté préraphaélite. Ce mouvement artistique, qui s'oppose à l'académisme pictural, professe un retour à la simplicité et à la grâce de la Première Renaissance. Ainsi, Rossetti emprunte aux portraits de Vinci, Botticelli ou Dürer le motif d'une figure féminine de trois-quarts, le visage incliné et le regard perdu vers le hors-cadre, se détachant sur un fond monochrome. Il rompt clairement avec l'école des portraitistes romantiques en sublimant cette chevelure sauvage, ondoyante et libre.
Ici, le portrait tout entier est l'écrin de cette parure. La teinte brune de ces cheveux aux reflets cuivrés, qui donne au tableau son titre et à la femme son nom, contraste singulièrement avec les nuances froides de la robe, du collier, du visage et de l'arrière-plan. La lumière s'y reflète avec une telle intensité qu'elle les transforme en une matière aussi précieuse que la soie et l'or, plus douce encore que la peau.
Les chevelures peintes par Rossetti, bien loin des coiffures contenues de l'époque victorienne, sont toujours l'expression d'une sensualité débordante et fougueuse, parfois vénéneuse, à l'image des boucles de Lady Lilith. Animées d'un mouvement érotique, elles se déploient en volutes somptueuses et retombent en cascade sur les épaules de ces femmes démoniaques que peintres et poètes du XIXe siècle se plairont à sacraliser.
