Chair de poule

Les critiques sont unanimes, et fort désobligeantes pour Duvivier : "Le rajeunissement du style et du ton Duvivier n'est pas pour aujourd'hui" pronostique Combat, tandis que Michel Aubriant écrit dans Paris-Presse qu'"il [eut] fallu un Aldrich, [et que] c'est le gentil Julien Duvivier qui opère".

Dans Les lettres françaises", Michel Mardore est (un peu) plus nuancé : "Nous savons tous depuis longtemps que Julien Duvivier n'est qu'un tâcheron, et son travail ne cherchant qu'à "distraire" le spectateur, il nous faudra le juger à ce niveau... Sous cet angle, Chair de poule apparaît comme l'une des plus honnêtes et des plus réussies transpositions d'Hadley Chase entreprises en France. Par miracle, Duvivier a su traduire en images la médiocrité de style de cet écrivain qui obtint une célébrité mondiale avec son mauvais pastiche de Sanctuaire... Les cinéastes [sic] sont restés fidèles à la fonction purement cathartique de la Série Noire, sans chercher des alibis sociaux ou psychologiques", ce à quoi fait écho la question de Paris-Presse, "Qui nous délivrera de James Hadley Chase ?", tandis que Télérama souligne les risques de la transposition en France d’une histoire située originellement aux Etats-Unis : "C'est une curieuse idée que d'avoir fait jouer à Catherine Rouvel le rôle d'une de ces mantes religieuses chères au romancier James Hadley Chase et qui n'ont d'existence réelle que dans les films noirs américains... Julien Duvivier, comme à l'ordinaire, cultive le "réalisme" le plus écœurant... C'est un film dégradant pour tout le monde".

Seul Raymond Chirat, quelques années plus tard, donnera un éclairage plus favorable à cet opus : "C’est le même grouillement monstrueux que dans Le Temps des assassins, filmé avec la même netteté, le même détachement, la même objectivité. De sales insectes vus à la loupe et, là aussi, le roman-feuilleton bourré de poncifs arrive à empoigner le spectateur, en dépit de Jean Sorel, imposé par le producteur Hakim, et véritable point noir du film".