The Last Show

samedi 11 février 2012, 21h15

Salle Henri Langlois

21h15 23h00 (105 min)

The Last Show A Prairie Home Companion
Robert Altman
États-Unis / 2005 / 105 min

Avec Meryl Streep, Kevin Kline, Tommy Lee Jones, Woody Harrelson, John C. Reilly.

Musiciens, comédiens et techniciens sont rassemblés pour la préparation du dernier numéro de la populaire émission "A Prairie Home Companion". Mais des passions et conflits, longtemps enfouis, éclatent au grand jour.

La tristesse provoquée par sa disparition, que l'on peut juger prématurée au vu de l'énergie créatrice qui se dégage de ses derniers films, est tempérée par le ton si personnel, si chaleureux, si libre de The Last Show, qui semble embrasser, récapituler toutes les thématiques et lignes de forces chères à Altman. Dramaturgie éclatée, mais aussi centrée autour d'un lieu, importance des troupes, des collectivités qui brassent toutes sortes de personnalités, va et vient entre le monde réel et celui du spectacle (politique, théâtral ou cinématographique, les frontières qui les séparent sont floues), entre les coulisses et la scène, entre le rêve et le désenchantement. Comment ne pas saluer cette mise en scène aérienne, qui fait la part belle à l'imprévu, au cocasse, qui continue de penser qu'explorer, découvrir, est plus important que reconstituer. Une mise en scène où l'on ne peut jamais prévoir l'ordre des plans.

On ne peut imaginer de plus belle fin de carrière que cette œuvre jubilatoire et bouleversante, ce film gai et pudique sur la mort (on refuse de mentionner sur scène que quelqu'un vient de mourir, ajout scénaristique d'Altman), cet hymne au monde du spectacle, n'importe lequel, des chansons vaseuses aux fausses publicités hilarantes, des airs de country qu'Altman affectionne aux gestuelles burlesque de Kevin Kline et à une version soudainement touchante de Frankie and Johnny par Lindsay Lohan. Tout devient source de plaisir, de bonheur, tout est récupéré par le regard ironique, hospitalier et tendre d'Altman : « rire de ses personnages, comme par exemple de Woody, c'est déjà les aimer », écrit Romain Lecler de Critikat. Le meneur de jeu transforme un accident, un problème, en un petit bonheur de théâtre ou une série de gags. Un trou dans le spectacle donne lieu à une chanson (faussement ou réellement) improvisée. On passe insensiblement du réalisme au fantastique. L'un des ordonnateurs du spectacle fait exécuter le promoteur immobilier qui veut détruire le cinéma, en le confiant à une femme femme que l'on croit fatale et qui l'est, au sens propre. Ange de la mort, elle accompagne les mourants et sa présence magique, fantastique, renforce le coté charnel, vibrant du spectacle. Le show-business survit aux vautours qui veulent le détruire par le souvenir qu'il engendre, et se montre plus fort que la vie quand celle-ci ne ressemble qu'à la vie.

Bertrand Tavernier