Eyes Wide Shut évoque la crise que traverse un couple new-yorkais lorsque Alice, révèle à son mari, Bill, ses fantasmes sexuels obsédants pour un inconnu. Découvrant un imaginaire érotique qui lui échappe, Bill, hanté par des images de sa femme se donnant à l'inconnu, va vivre, au cours de plusieurs nuits d'errance, des expériences qui le confrontent à ses propres fantasmes et à sa vraie identité.
Dans la scène centrale du film, masqué et revêtu d'une cape, Bill s'introduit dans une soirée secrète et assiste, parmi des participants masqués, à un rituel orgiaque dirigé par un maître de cérémonie (masqué lui aussi et vêtu de pourpre à la manière d'un cardinal).
Les masques des invités se révèlent d'une grande diversité. La plupart évoquent le carnaval de Venise, mais surviennent aussi des masques africains, un visage au style cubiste, des visages grotesques, des masques d'animaux et des figures mythologiques, dans une allégorie de l'humanité mêlant instincts primaires et spiritualité.
Le masque de Bill semble étrangement inexpressif : au-dessous de l'ornementation dorée apparaissent des mâchoires en porcelaine grises et serrées. Seuls ses yeux l'animent.
Au lieu de dissimuler son imposture, le masque l'accuse : Bill est reconnu. Les "officiants" de la cérémonie secrète, après lui avoir demandé de se démasquer, lui ordonnent de se déshabiller au centre du cercle cérémoniel.
Dans le dernier mouvement du film, Bill, qui a égaré le masque de façon incompréhensible, le découvre avec effroi sur son oreiller, à côté de sa femme endormie. Il ne peut se débarrasser de ce masque, devenu mortuaire, signe visible de sa dérive.
Dans Eyes Wide Shut, le visage est un masque, l'individu se cache derrière une fonction sociale. Bill se montre sans cesse déguisé : en tenue de soirée ou sous sa blouse blanche de médecin. Lors de la soirée secrète, le masque coloré révèle comme un écran de cinéma sa vraie identité, faite de désirs inassouvis.